Module 13. Éristique. Erreurs et réfutation. 71 interactions. 54 QCM.

Éris est moins connue qu'Éros; l'éristique que l'érotique; la guerre que l'amour. Faut-il s'en plaindre? Mais la lutte -- verbale -- est-elle nécessaire à l'écrivain? Relève-t-elle de son art, ou d'une technique plus utilitaire?
Réaction 1


Éristique est un vieux mot tiré du grec (, "colère") pour désigner des méthodes qui, comme la poudre à canon, viendraient originairement de Chine. C'est l'art de réduire l'adversaire au silence. Ce fut en Grèce l'art de disputer des rhéteurs (Cf. Socrate, par exemple dans l'Euthydème de Platon). La disputatio scolastique, qui prend aujourd'hui la forme de l'essai ou de la dissertation, s'y rattache. Le plan de la dissertation donne la parole aux antagonistes à tour de rôle.

Mais la colère n'est pas bonne conseillère. À vouloir blesser, on se met à découvert. Mieux vaut se garder, et guetter les mégardes, pour que les coups portent. Alors, verbalement, dira-t-on qu'il faut que l'adversaire se soit trompé avant qu'il soit possible de le réfuter? La bonne réfutation est-elle fondée sur une erreur adverse?
Réfuter un argument c'est ________.
1 améliorer cet argument
2 en montrer la fausseté
3 s'y opposer
4 le critiquer
Réaction 2


La réfutation est en effet un cheminement logique par lequel on parvient à démontrer la fausseté d'une allégation. Pour réfuter, il suffit de mettre en évidence un point faible de l'argumentation adverse. Il y en a toujours. Faute d'analyse, faute de savoir reconstituer les raisonnements en visée, preuve et surtout type d'argument, on peut avoir l'impression qu'il faut être une sommité pour dépasser les prédécesseurs; mais la nature des choses est telle qu'il y a toujours moyens d'établir des points faibles. Celui qui argumente s'est rendu vulnérable. Celui qui réfute aussi, évidemment.

De plus, on observe dans les cours de justice un formalisme qui permet aux avocats de créer aisément des réfutations minimales (demande de preuve de chaque allégation). Il ne suffit donc pas d'avoir raison pour faire accepter son point de vue, surtout avec un adversaire de mauvaise foi. Il en est de même dans la vie courante, malheureusement (heureusement parfois).

Faudrait-il alors distinguer entre "erreurs vraies", à dénoncer en toute sincérité, et "peaux de bananes", ruses fallacieuses? L'éristique se devrait-elle de respecter d'abord la vérité?
Réaction 3


Le respect de la vérité, la sienne et celle des autres, est une question d'éthique personnelle mais l'éthos est un des aspects que l'éristique prend en compte : c'est l'image que l'on projette de soi. Même si le juge doit reculer devant les ruses avocassières, il ne les approuve pas. L'objet de ce chapitre est de montrer comment trouver les erreurs véritables et des répliques adéquates. Les points faibles d'un discours, intrinsèquement ou par rapport au contexte, peuvent servir de base à des réfutations. Les ruses courantes seront mentionnées aussi.
Questions à se poser devant chaque argument adverse.
Qu'a-t-il voulu prouver? Quelles sont ses preuves? Ont-elles les qualités nécessaires? L'argumentation est-elle inductive? Quelle est sa base argumentative (opinion du public sur la valeur)? Quel est le lieu commun concerné? Si l'argumentation est déductive, quels sont les postulats? Quelle en est la source? Et l'adversaire donne-t-il de lui-même une image qui ne le discrédite pas?


Comment réagir, par exemple, si nous lisons ceci.
Le patronat canadien affirme: "Les salaires sont trop élevés. Il faut donc geler les salaires." Sommes-nous devant un véritable raisonnement?
1 Oui, car il repose sur les relevés de Statistique Canada.
2 Non, car il n'y a aucune relation entre un gel des salaires et l'affirmation qu'ils sont trop élevés.
3 Oui, car le patronat subit la concurrence internationale et connaît la conjoncture.
4 (Autre chose)
Réaction 4


L'argument est mal fondé. On pose ce qui est difficile à prouver comme un axiome. Les salaires sont-ils toujours trop élevés? Sinon, dans quels secteurs le sont-ils? Est-ce par rapport à une moyenne régionale, nationale, internationale? En lui posant ces questions, vous mettez sur l'adversaire le «fardeau de la preuve». Il croyait pouvoir présenter son argument comme une évidence. Il suffit d'ébranler la confiance du public par quelques questions pour dissiper «l'effet de crédulité naturelle».

On voit que la moindre intervention, le bout de phrase innocent quel qu'il soit, peut receler un argument. Il a alors un rôle à jouer dans la réfutation. Tout repose sur le comportement de l'auditeur potentiel. Est-il d'accord avec la majeure implicite, il se laisse gagner. Ne décode-t-il même pas la présence d'une raison, décode-t-il seulement la visée, cherche-t-il des complicités dans ses intentions propres, les positions restent figées. C'est souvent le cas. Le mot même de complicité a perdu ses connotations péjoratives. Il ne veut plus dire « entente criminelle » mais seulement « sympathie », « échanges privilégiés ». On gagne son public par un enthousiasme communicatif pour une « bonne » cause, comme en publicité, au lieu d'analyser, de trouver les raisons, d'éprouver leur pertinence, leur solidité, leur suffisance.

Or comment poser les bonnes questions? Au départ, le minimum vaut le mieux. On peut même ne poser que des questions sur le sens des expressions. Il peut arriver que ce qui se donne pour argument ne soit qu'une façon, généralement admise, de s'exprimer.
--- Pourquoi la chauve-souris n'est-elle pas un oiseau? --- Parce que les biologistes la classent autrement. Cette réponse est ______.
1 absurde
2 tautologique
3 contradictoire
4 (Autre chose)
Réaction 5


Une définition tautologique ne fait que reprendre le même concept sous diverses formes, sans détailler les éléments de signification (sèmes génériques, spécifiques, virtuels). Autrement dit, la tautologie semble expliquer ou justifier un énoncé alors qu'elle ne fait que le répéter. Elle cache une absence d'argument.
"Une cause est quelque chose qui produit un effet." Cette définition est ______.
1 incomplète
2 tautologique
3 correcte
4 (Aucune de ces réponses)
Réaction 6


Un dictionnaire, le Lexis (Larousse), en regroupant les termes et en refaisant les définitions, a tenté d'échapper le plus possible à l'écueil de la tautologie par synonymes, donc de la circularité des définitions. Mais l'argumentation est un domaine plus vaste que celui des définitions terminologiques. Si la plupart des dictionnaires tombent dans la circularité, les arguments y échappent encore moins. Il s'agit pour eux de mettre en relation des concepts et de produire cette mise en relation dans les esprits des interlocuteurs. Il ne suffit pas de dire les choses telles qu'elles sont dans les mots. On verse dans la tautologie par facilité, par excès de confiance dans la forme qui fut celle où l'on a capté une pensée, alors qu'il faudrait redécouvrir cette pensée et la propulser en la renouvelant comme sa pensée propre. Le langage devrait dépendre de la pensée et non l'inverse.

Il y a donc une présence du langage qui, par inertie, dissout la pensée actuelle. Ex. les voeux pieux des gens en place, conventionnels. «Une année de prospérité et de bonheur» en pleine récession.

La banalité va jusqu'à des glissements de sens.
«Depuis que mon mari est mort, il n'y a plus de bêtes à la ferme.»
1 Il faut un esprit «mal tourné» pour rire de cette phrase.
2 L'expression est équivoque.
3 Elle prête à redélimitation de l'espace mental.
4 Il suffirait que la veuve prenne soin de sa liaison: bêtes-z-à.
Réaction 7


Dans le glissement de sens, on voit un argument, par changement de contexte, impliquer une modification de la thèse. Les recueils de perles en relèvent des exemples et la vie quotidienne n'en offre pas moins. Ex. Les marins sont des hommes utiles et nécessaires, sans lesquels la marine n'existerait pas. (BECHTEL, Guy et Jean-Claude Carrière, Dictionnaire de la bêtise et des erreurs de jugement. Et Le livre des bizarres. Paris, Laffont, coll. bouquins, 1991, 477p. et 313p., p.267). Trouvez l'erreur et cherchez à rétorquer (de manière à réfuter).
Réaction 8


À trop vouloir prouver la nécessité d'avoir des marins, on est tombé dans le truisme. Pour réfuter, il suffit de faire ressortir la tautologie. «Et sans la marine, les marins non plus n'existeraient pas!»

Même exercice : "Pour obtenir un volume moins encombrant et en faire bénéficier un plus grand nombre de régiments, nous avons décidé de scinder ce manuel en deux" (Manuel du gradé d'artillerie lourde, cité ibidem, p.264)
Réaction 9


L'objectif est certainement atteint mais sans doute aussi dépassé puisqu'il manquera la moitié du texte! Pour réfuter, faire apparaître l'impertinence. «On y aurait gagné encore davantage en le divisant en trois! (sur un ton moqueur)».

«Mieux vaut un grand malheur qu'un petit, car le petit passe inaperçu tandis que le grand est profitable par l'évocation qu'il comporte d'un plus grand, d'un bien pis encore, qui eût pu sévir à sa place.» (Georges Courteline, cité Dict. de la bêtise, p.262).
Réaction 10


Une telle démonstration vaut aussi bien pour le contraire. Réfutation : «Oui, mais mieux vaut un malheur minuscule qu'un petit, car, pour un malheur, le mieux c'est de passer inaperçu.»

"La marmotte ne dépense que peu de calories durant sa léthargie hivernale, ses seules activités consistant alors à ouvrir l'oeil de temps à autre pour éliminer ses urines et expulser ses excréments." (Dict. de la bêtise, p.267)
Réaction 11


Activité minimale qui ne doit pas être prise au pied de la lettre! On rétorquera : «Voilà ce qui s'appelle pisser de l'oeil!»

La publicité aussi joue sur des glissements de sens mais c'est pour réveiller et chatouiller l'imagination. Du moins évite-t-elle ainsi les arguments trop explicites, qui risquent de produire un effet didactique.

Trouver l'erreur.

Déceler le point faible des arguments demande une réflexion exempte de préjugé.
Un employeur annonce de grosses coupures de salaire. Un travailleur s'exclame: "Si je sors pour faire la grève, on me coupe mon salaire, si je ne sors pas pour faire la grève, on me coupe mon salaire quand même. J'aime mieux faire quelque chose et être coupé que ne rien faire et être tout de même coupé. Donc je vote pour la grève." Ce raisonnement est ________.
1 Erroné, parce que "les grèves, ça ne donne jamais rien!"
2 Juste, puisque de toute façon on ne peut rien contre les coupures.
3 Erroné, car les deux baisses salariales en question sont différentes. Elles ne s'excluent pas.
4 Juste, car quand on a le choix entre deux inconvénients, il vaut mieux choisir celui où on a le plus de contrôle.
Réaction 12


Il arrive souvent qu'un même mot recouvre des réalités fort différentes. Ici coupures est employé pour désigner une réduction du salaire décidée par l'employeur et un manque à gagner décidé par l'employé. Cela fait apparaître comme équivalentes des choses qui ne le sont pas. Opter pour l'inconvénient majeur en vue d'avoir le maximum de contrôle n'est pas la seule solution.

Faut-il dévoiler le maximum de points faibles pour mettre les chances de son côté? Toutes les erreurs de l'adversaire doivent-elles être relevées?
Réaction 13


Trop réfuter est prendre une peine inutile. L'important n'est pas là. L'important est de se mettre du côté de la vérité et de la sincérité. Un raisonnement trop parfait peut laisser une mauvaise impression (excès d'habileté = manque d'objectivité). Un doute seulement suffit, s'il est bien introduit dans l'esprit des jurés, surtout quand ils ne sont pas trop idéalistes ou revanchards, car ils doivent aussi être conscients des risques qui accompagnent leur responsabilité.

Si accumuler les preuves n'est pas toujours possible, ce n'est finalement pas tellement nécessaire : il y a de tels avantages à se contenter de réfutations simplement interrogatives. Saviez-vous pourquoi se contenter de soulever des questions est préférable?
Réaction 14


Renforcer ses positions même par de bons arguments ne produit pas toujours le meilleur effet du point de vue de l'image que l'on offre de soi. De plus, si bon qu'il soit, un argument offre des points faibles. En interrogeant sans plus, on évite de se charger du fardeau de la preuve. C'est cela qui compte, surtout quand l'adversaire est peu honnête. Il va s'enferrer lui-même mieux que quiconque ne le pourrait faire. Exemple.

Voici un choix de réfutations. Laquelle est la plus intéressante?
En Suisse, les services postaux sont une société de l'État. Cette société, en 1986, a fait des profits: plusieurs centaines de millions de francs, qu'elle a versés à l'État. Conclusion: cette société est très bien gérée. Comment la presse pourra-t-elle réfuter une telle conclusion?
1 Réclamer une baisse du prix des timbres (retour du profit aux usagers).
2 Protester contre la diminution des services (Une livraison par jour au lieu de deux).
3 Suggérer de réinvestir dans la modernisation des équipements.
4 Se demander si les postes ne pourraient pas songer à améliorer leurs services.
Réaction 15


Par ailleurs, si l'on manque de preuves, on ne pourra guère échapper à une contre-réfutation car elles vont être exigées. Pour éviter de perdre pied, mieux vaut se contenter de poser des questions, sans accuser, même si on aurait raison de le faire.

La réfutation n'a donc pas besoin de prouver l'inverse, ni d'être péremptoire. Elle doit surtout se soucier de gagner la faveur du public, d'obtenir son accord provisoire. Il suffit donc qu'elle ait introduit un doute. Exemple.

-- Le tabac est dangereux pour la santé. --- Mais d'autres dangers sont bien plus graves.

(On ne dit même pas lesquels. L'auditeur acquiesce déjà.)

C'est ainsi. (Hélas?) Il y a des arguments qui plaisent, et ce sont ceux-là qu'il faut préférer, même quand l'argument qui plaît le plus prouve davantage autre chose.
La preuve de l'importance du camembert dans l'histoire de France, c'est qu'il n'y a sans doute aucun personnage important de celle-ci qui n'ait pas figuré sur les étiquettes. La principale qualité de la raison alléguée ici, c'est qu'elle est ____.
1 vraie
2 pertinente
3 frappante
4 (Au choix mais de préférence 1)
Réaction 16


Faire parler un personnage donne aux arguments une allure moins abstraite; mais il suffit de se plonger dans la complexité courante des rapports interpersonnels pour que les déclarations soient à réinterpréter.
Anne déclare: Évidemment... qu'il est avare! Un jour, il m'a dit: "Payer 80 sous pour un verre d'eau, non. J'aime mieux m'en passer". Le raisonnement d'Anne ________.
1 est solide
2 est une généralisation
3 se détruit lui-même
4 pourrait se détruire lui-même
Réaction 17


Les valeurs en cause ne sont pas toujours départagées d'avance. Plutôt que de se lancer dans la subtilité des analyses réalistes, le rentable (comme le savent trop bien certains politiciens) est de simplifier dans la pente de l'opinion. «Se priver d'un verre d'eau pour ne pas devoir dépenser 80 sous!» Que l'on puisse préférer de ne pas se laisser exploiter n'est-il pas aussi une valeur? Rien ne dit que la raison du refus soit le besoin de faire une économie aussi minime...

Ce qui pousse aussi dans le sens des oppositions faciles est l'importance de la clarté dans la communication. Ne vous est-il jamais arrivé de devoir choisir entre la vérité et la simplicité dans vos réponses? N'est-il pas parfois difficile, sinon impossible, de faire comprendre toutes ses raisons parce qu'elles sont trop nuancées ou trop nombreuses?
Réaction 18


Les choix à faire tiendront compte des limites du destinataire, de la question implicite qu'il est en train de se poser. Si on contredit, que va-t-il penser? Et si on ne le contredit pas, que va-t-il aussitôt conclure? Mais y a-t-il une troisième voie?

Le principe de non-contradiction.

Selon ce principe, il est impossible de simultanément affirmer et nier la même chose. Exemple. Quelqu'un se trouve en face de la porte ouverte de l'ascenseur mais n'y entre pas. --- Montez-vous? --- Oui... (Il reste là.) N'y a-t-il pas contradiction? S'il dit qu'il monte, ne devrait-il pas le faire?
Réaction 19


Il y a contradiction puisqu'il ne peut pas en même temps monter et ne pas monter. On remarquera cependant qu'il peut aussi monter mais pas tout de suite parce qu'il attend quelqu'un qui est sur le point d'arriver. Ou encore qu'il sait que l'ascenseur descend alors que lui veut monter. Bref, le contraste s'efface. Soupir de soulagement, on se voit rassurer : l'interlocuteur n'était pas fou, il ne niait pas le principe de non-contradiction. Seulement, il ne disait pas tout. On pouvait croire le principe nié puisqu'il disait monter et ne montait pas. On peut maintenant respirer : on comprend qu'il cherchait seulement à gagner quelques secondes ou qu'il avait compris autre chose.
"Comme une réponse, les slogans inscrits sur la façade blanche du ministère de la Vérité lui revinrent à l'esprit: La guerre, c'est la paix, La liberté, c'est l'esclavage". (Orwell, 1984) En prenant le texte au pied de la lettre, quel est le vice de ces raisonnements?
1 La tautologie.
2 La généralisation hâtive.
3 Le principe de non-contradiction n'est pas respecté.
4 L'ignorance de la cause.
Réaction 20


Sortir d'une contradiction s'opère en faisant une distinction. Si celle-ci n'est pas acceptée, on s'expose à une apodioxis : rejet d'une proposition, qualifiée d'absurde.

Ab absurdo.

Le raisonnement ab absurdo est une astuce ironique et amusante de la réfutation. On fait éclater, par une simple exagération, quelque incohérence qui se décèle entre la visée de l'adversaire et le discours qu'il tient. On feint de le prendre à la lettre.
L'enquêteur: --- Le français, c'est important pour toi? --- J'pense bien! C'est ma seule langue! Si j'l'avais pas, j'pourrais même pas parler...
1 On amplifie l'argument adverse jusqu'à l'absurde (contre-litote).
2 Se moque-t-on sans en avoir l'air (persiflage)?
3 Reporte-t-on sa pensée sur ce qui vient d'être dit (réflexion)?
4 Montre-t-on dans l'argumentation adverse une conséquence impossible (ab absurdo)?
Réaction 21


L'argument ab absurdo consiste à développer une conséquence possible de la position de l'adversaire, et à l'amplifier jusqu'à l'absurde. Dans l'exemple suivant, on argumente contre le mariage.
Mieux vaut éviter les contraintes. Il est capital à mes yeux que ce soit très spontané quand on se dit l'un à l'autre des mots d'amour. C'est ça qui montre un sentiment authentique. Parmi les réfutations suivantes, y a-t-il des arguments ab absurdo? A. Même si on a évité le mariage, on risque toujours de céder à la facilité ou à l'habitude. B. Vous voyez l'amour comme qqch. à recommencer sans cesse, non comme qqch. qui dure. C. La recherche de preuves d'authenticité est un manque de confiance en soi. D. Moi, je ne voudrais pas vivre avec qqn qui a besoin constamment de preuves.
1 Aucun.
2 Quatre.
3 A et D.
4 A.
Réaction 22


Il y a des ab absurdo qui ne sont que des façons de parler.
Il lui avait proposé un scotch mais elle a réclamé une tisane. Quand il revient de la cuisine, Lucien s'exclame: "Voilà... Et si elle est bonne, tu peux me tuer!" Une telle déclaration est ________.
1 une hyperbole
2 un défi
3 une supposition
4 une réfutation par l'absurde
Réaction 23


L'ab absurdo permet donc de faire des hyperboles. C'est aussi un procédé expressif. Pour en inventer un, on bâtit une hypothèse qui ouvre la porte à une réaction excessive.
L'orphelin Tit-Coq de Gratien Gélinas se croit laid, affreusement. Il dit au Padre: "Vous m'avez regardé en pleine face? Un type comme moi, rien que sa mère pourrait le trouver beau". Dans cette dernière phrase, quel est le procédé utilisé?
1 L'euphémisme.
2 L'hyperbole.
3 Le sarcasme.
4 L'argument a fortiori.
Réaction 24


L'ab absurdo tire son nom de l'invraisemblance de l'hypothèse. Elle se réfute en montrant qu'elle n'est qu'une façon de parler.

Identifier le type d'erreur argumentative.

Pour trouver des réfutations, on cherchera à identifier le type d'argument de l'adversaire. Le type de base, le plus fréquent, le plus visible, c'est tout simplement l'absence d'argument. Quand on ne parvient pas à en identifier un, c'est parfois qu'il n'y en a pas. Répéter la même chose de plusieurs façons, la peindre, la faire sentir de l'intérieur... ce n'est pas la justifier par une raison que peut partager un «père de famille» (notion juridique latine).
On lit dans un manuel d'histoire: "Par les actes qu'il a posés pour sa nation et pour la paix mondiale, John F. Kennedy fut un grand président, un grand Américain, un grand homme. Ses actions réfléchies et dévouées au bien-être national et mondial furent le reflet d'un homme doué d'une stature hors du commun". Quel est le défaut du raisonnement implicite de ces deux phrases?
1 Cercle vicieux.
2 Énumération imparfaite.
3 Appel à l'autorité.
4 Ignorance de la cause.
Réaction 25


L'absence de raison se réfugie parfois dans une prétendue objectivité, avec une surabondance de faits qui se trouvent comme en suspens, qui ne jouent pas tout à fait leur rôle. C'est qu'ils auraient besoin d'un argument implicite.
Accusé d'avoir adopté une position partisane (pro-sioniste) dans son article sur le conflit israélo-arabe, Dominique répond: "Ce que j'ai dit dans mon article est vrai, je n'ai utilisé que des faits." Cet argument est-il convainquant?
1 Non. Les faits ne parlent pas d'eux-mêmes.
2 Oui. Dominique est une personne honnête.
3 Non. On ne tient pas compte des erreurs de raisonnement.
4 Oui. Les faits constituent d'excellentes preuves.
Réaction 26


Le moyen de transformer un fait (ceux de vos fiches doc) en preuve est d'avoir un argument qui s'y rattache de façon pertinente.
L'agence Chine nouvelle, commentant un exercice de natation du président Mao, diffusait, en 1966: "Sa traversée du Yangtsé à la nage a été un puissant encouragement pour le peuple chinois et les révolutionnaires du monde entier, et un coup très dur porté à l'impérialisme, au révisionnisme moderne et aux monstres qui s'opposent au socialisme et à la pensée de Mao-Tsé-Toung." Qu'est-ce qui rend ce commentaire fautif?
1 Appel au préjugé.
2 Généralisation hâtive.
3 Association fautive.
4 Manque de pertinence.
Réaction 27


D'autres points faibles sont à trouver du côté de la source de l'argumentation. D'où tire-t-elle sa prétendue efficacité? Est-ce de la conviction personnelle de l'utilisateur ou bien d'une autorité reconnue par tous? L'auditoire exige souvent un appui sur quelque texte faisant loi, malgré le risque de la «langue de bois», de la forme «canonique», de la légalité de façade.
Dans sa dissertation, François écrit: L'homme se définit par ses choix, par les actes qu'il pose, "l'homme est ce qu'il fait" (André Malraux). Par rapport à l'ensemble de la phrase, le texte souligné est ________.
1 une hypothèse et une définition
2 une conséquence et une synthèse
3 une confirmation et un appel à l'autorité
4 (N'importe)
Réaction 28


La forme fait bonne impression, certes, mais on gagne à aller tout de même au fond des choses, surtout si on n'est pas d'accord.
L'opposition anglophone interroge le maire de Montréal sur les raisons d'une décision jugée hâtive (rebaptiser une artère importante de la ville). Celui-ci répond: «Nous prenons nos responsabilités. Quand le président Kennedy est mort, la Ville a aussi donné son nom à un lieu public.» Les raisons alléguées ______.
1 sont vraies puisqu'elles ne contiennent que des faits
2 sont tendancieuses puisqu'elles camouflent la hâte et l'absence de concertation
3 sont habiles puisqu'elles retournent l'argumentation avec des faits pertinents
4 sont inadéquates puisqu'elles ne répondent pas à l'objection
Réaction 29


La valeur d'un argument est constamment à réévaluer. Elle dépend notamment des autres arguments présents ou implicites. Ne faut-il pas éviter de se donner des raisons si elles sont fausses, ou s'il en existe de meilleures?
Vous détestez nettoyer le four. Vous achetez donc une cuisinière avec un four autonettoyant. Vous déclarez à vos amis que les écologistes considèrent les nettoyeurs à four comme des agents de pollution et que, pour cette raison, vous avez choisi un four qui n'en a pas besoin. Ce raisonnement est basé sur ________.
1 un appel à l'autorité
2 une rationalisation
3 un raisonnement déductif
4 (1, 2 et 3)
Réaction 30


Et comme tout change selon les moments, inutile d'essayer de prendre des précautions ou de remonter dans le temps.
--- La voiture a fait de l'aqua-planing. --- Et tu n'aurais pas pu freiner à l'avance?
1 Jugement a posteriori.
2 Jugement a priori.
3 (N'importe)
4 (Autre chose)
Réaction 31


Ce qui est faux est parfois seulement dans le ton. Celui-ci est capital, même dans les spectacles. Il reflète la position du locuteur par rapport à son public.
On aima citer ce mot de G.B. Shaw, écrivain caustique londonien du début du siècle: "Croyez-moi, il faut épouser une mulâtresse. Ce sont les meilleures épouses". Cette remarque aura été jugée humoristique ________.
1 par son originalité, eu égard au milieu
2 parce qu'elle se rit du mépris de la haute société pour les autres couches sociales
3 parce qu'elle remet en question l'emprise morale de la femme blanche cultivée
4 parce que le ton est à l'inverse du contenu
Réaction 32


De cet exemple on peut tirer une remarque importante. Sur quels principes peut-on s'appuyer pour avoir une bonne majeure implicite? N'importe lesquels?
Réaction 33


N'importe si le raisonnement est un exercice sans plus mais pas s'il s'agit réellement de convaincre. Dans ce cas, la majeure doit être solidement installée d'avance dans l'esprit des auditeurs. Le principe invoqué doit être strictement dépendant de l'opinion du moment dans le groupe social. Inutile d'essayer d'argumenter en dehors d'un auditoire connu et déterminé. C'est lui seul qui peut apercevoir le bien-fondé des postulats.

Il y a un moyen simple de découvrir des arguments de réfutation : la topique, ici aussi.

Lieux communs de la réfutation.

Supposons même que l'argument de l'adversaire ne contienne pas de point faible assez évident. Il reste une ressource : lui en trouver, en voyant les types d'arguments qu'il a évités. Il s'agit d'explorer les lieux communs où il ne s'aventure pas. Il se peut que ceux-ci ne le favorisent pas. On peut dire que la réfutation a les mêmes lieux communs que la majeure du syllogisme, mais inversés deux à deux, comme ceci.
1. L'essence se réfute par l'absence de l'existence (et l'existence par l'absence de l'essence).
2. La qualité se réfute par l'absence de quantité (et la quantité par l'absence de qualité).
3. La finalité se réfute par l'absence d'ordre (et réciproquement).


Voici quelques exemples, où vous pourrez reconnaître les topiques ci-dessus.

1. Le kantisme a les mains pures, mais il n'a pas de mains. (Péguy).
Réaction 34


Le kantisme a les mains pures est un argument de l'essence (de la philosophie). Mais il n'a pas de mains est un argument de l'existence (il faut savoir agir aussi).

2. Justice est faite mais quelle justice?
Réaction 35


On a agi en vue de rétablir la situation (existence). Mais ce qui a été fait, était-ce bien ce qu'il fallait (essence)?

3. La fable du héron de La Fontaine. «Moi, des tanches, dit-il. J'ouvrirais pour si peu le bec!...»
Réaction 36


La quantité manque, même si la qualité y est.

4 «Il l'ouvrit pour bien moins»
Réaction 37


En se contentant de la quantité disponible, car il doit maintenant éviter les affres de la faim, il ne se pose même plus la question de la qualité.

5. Embrassez-vous! (Le téléphone sonne).
Réaction 38


Finalité interrompue par le désordre.

6. Dans un camp de prisonniers des Nazis, un soldat français, militant communiste, cherche à faire de la propagande pour le Parti. Il est rabroué par son copain :«Et toi, sans chefs, sans mots d'ordre, sans contact, sans nouvelles, tu vas reprendre cette plate-forme périmée de ta propre initiative.» (Sartre, la Mort dans l'âme, p.358)
Réaction 39


Désordre interrompu par le retour à une finalité.
Des soldats français ont été faits prisonniers en 1940. Leur aumônier s'absente, il fréquente les officiers prisonniers, parle avec les gardiens. Commentaires d'un communiste :«Je me fous de ses intentions : il veut peut-être sauver la France. Mais objectivement, c'est un prisonnier français qui passe ses journées avec l'ennemi. Voilà ce que les copains doivent savoir.» (Sartre, la Mort dans l'âme, p.353) De quel type de réfutation s'agit-il?
1 La finalité (on va le faire passer pour un traître).
2 Le désordre (il n'est pas à sa place).
3 La quantité (il passe tous son temps avec les Fritz)
4 L'ignorance de la cause (on est prisonnier parce qu'on est en guerre).
Réaction 40


On peut se défendre seul quand on a la raison pour soi. Même devant les gens les plus compétents.
Pilate s'étonne de la confiance en soi de Jésus en face de lui. «Ne sais-tu pas que j'ai le pouvoir de te faire crucifier?» Réponse: «Tu n'aurais sur moi aucun pouvoir s'il ne t'avait été donné d'En-haut». De quel type sont l'argument de Pilate et sa réfutation?
1 Qualité et quantité.
2 Désordre et ordre.
3 Existence et essence.
4 (Autre chose)
Réaction 41


Que penser de l'argument que voici?
«Cet avocat est d'ailleurs nettement plus productif que ses confrères! En effet, dans l'espace de quelques mois, il a ouvert plus de dossiers que tous les autres en un an.» La productivité est, ici, démontrée ________.
1 de façon quantitative
2 de façon qualitative
3 de façon subjective
4 (Il n'y a pas de définition implicite.)
Réaction 42


Universalité et accident inverse.

Qui entreprend une réfutation fera bien de prendre comme point de départ l'endroit de l'argumentation adverse où il pourra trouver une norme universelle. En effet, personne ne pourra achever une telle démonstration, qui devrait vérifier tous les cas. Une démonstration universelle est impossible a priori. Sachant cela, quelles que soient les préventions de l'auditoire, il est possible d'argumenter. Comment s'y prendre pour réfuter une majeure universelle?
Réaction 43


Que son universelle admise soit un argument par essence, qualité ou visée, le processus sera le même. En effet, que l'on oppose à cette norme si solidement établie un seul exemple du contraire (en termes de logique, un «accident inverse»), donc une existence, une quantité ou un désordre, un seul, et tout est remis en question : la norme aura perdu son universalité. Telle est la puissance des exemples individuels auxquels se plaisent certains discours politiques. La moindre exception balaie la certitude, elle ne confirme pas la règle à moins de pouvoir être attribuée au hasard. Tel est le sens du mot accident.

On dit, par exemple, qu'une hirondelle ne fait pas le printemps. Vous apercevez une hirondelle (une seule) : vous n'êtes pas en droit d'inférer qu'elles sont toutes revenues et que le printemps est là. Mais comme accident inverse, votre hirondelle est efficace : elle permet de nier que l'hiver, lui, soit encore en train de sévir excessivement. La particulière ne permet pas d'affirmer son universelle mais elle réfute entièrement l'universelle inverse.

Il y aurait donc double statut pour les exemples concrets : échantillon conforme ou exception à la règle. Les faits sont évalués par les règles, et inversement. Qu'en pensez-vous?
Réaction 44


Effectivement. Tout exemple doit recevoir un statut. Ou bien il est généralisable, ou bien il s'agit d'un cas particulier. Ex. «Léon X (1475-1521) avait un page avec lequel il entretenait des relations homosexuelles. L'homosexualité n'est donc pas une chose absurde. Oserait-on qualifier un pape de dégénéré?»

Cet argument, s'il n'est pas une parodie, valide l'homosexualité par l'autorité papale. Un seul exemple peut donc être doté d'un poids considérable. Mais pour l'Église catholique, qui récuse l'homosexualité, ce sera une exception. Elle pourra ainsi contourner le fait, à moins de condamner la conduite d'un de ses papes.
"Les professeurs d'université ont la belle vie. ________." Parmi les divers arguments à l'appui que voici, lequel serait, non le plus mais le moins valable?
1 Tonptit n'est jamais à son bureau.
2 Mongreau passe ses journées au golf.
3 Ils ont un très bon salaire.
4 Ils ont six heures de cours à faire par semaine.
Réaction 45


Quant à la preuve, elle ne peut guères résister à un examen qui l'envisagerait des trois points de vue : solidité, pertinence, suffisance. Elle est insuffisante en quantité (cas particulier) ou en qualité. Une illustration (donner du corps aux idées par un exemple frappant) n'est pas une preuve suffisante. Évidemment, le cas particulier a de la force, mais c'est la force de l'imagination : même si l'on ne donne pas de preuve suffisante, il impressionne.
--- Je comprends pourquoi les étudiants sèchent les cours en fin de session. Quand je vois Lucie, ce qu'il lui reste à faire comme travaux... --- Oui mais, hier, Léa, qui a manqué la dernière période, elle était dans les corridors à baguenauder. Cet «exemple du contraire» _____.
1 ne prouve rien
2 prouve que les étudiants ont diverses raisons de s'absenter
3 prouve qu'ils ne sont pas si occupés qu'ils le disent
4 prouve qu'ils ont tort de manquer leurs derniers cours
Réaction 46


La faiblesse de l'argument vient ici de sa particularité. C'est comme l'hirondelle qui ne fait pas le printemps. Du moins a-t-elle mis fin au règne hivernal.

On pourrait envisager l'accident inverse comme un manque de cohérence entre la pensée et le réel. Il y a des manques de cohérence plus graves, purement logiques.

Le manque de cohérence.

Une des réfutations les plus admises consiste à déceler des manques de cohérence. Mais si l'incohérence doit être évitée, elle reprend ses droits quand il y a un effet comique en vue. Que penser de celui-ci?
J'observai le président Mao pendant plus de trois heures. Il ne m'impressionnait pas à première vue. Nul éclair d'énergie électrique n'émanait de sa personne. (Robert Payne, Journal de Chine, cité Dict. de la bêtise, p.265).


Que la séance ait duré des heures devrait renforcer la qualité de l'observation mais tout ce qui est dit nie l'utilité de cette durée.

Et dans le cas suivant, y a-t-il véritablement incohérence?
La ville de Makalé est déserte et les Italiens distribuent des vivres aux habitants (Ibidem, p.261).


Le malheur de la ville est si total qu'on ne se rend pas compte de cette incohérence. Elle est purement théorique, sans doute, car les rues sont désertes, et les habitants se terrent, mourant de faim.
BILL YONG Restaurant chinois. "La cuisine canadienne par excellence."
1 Le slogan a un effet comique.
2 Non. Il est normal. Un restaurant chinois peut offrir aussi de la cuisine canadienne.
3 Il y a incompatibilité. On ne peut à la fois offrir de la cuisine chinoise et de la "cuisine canadienne par excellence".
4 Le projet est trop ambitieux, simplement.
Réaction 47


L'incohérence logique joue sur les essences, facilement incompatibles. Comment vérifier qu'il ne s'agit pas simplement de qualité? Perelman offre un critère : l'excès ou le manque. Ils se perçoivent à l'intérieur de limites qui sont celles de «l'essence». Ex. Du pain mal cuit, ce n'est pas du mauvais pain, ce n'est même plus du pain. On est hors limites. Même du mauvais pain doit être bien cuit. Cela dépend aussi des contextes et des époques.

Le contraire de l'incohérence est l'association. Pour être admise, elle devrait avoir un minimum de fondement. On pourra donc taxer son adversaire de raisonner par association (fausse).

Association fausse.
Ma voisine de balcon attribue aux comètes des influences néfastes. Une comète qui apparaît dans la constellation du Bélier provoque la sécheresse. De plus, elle considère les comètes comme des signes de mauvais augure. «Par exemple, la comète qui apparut en 1811 présagea la défaite de Napoléon.» Ce raisonnement vous semble-t-il rationnel?
1 Oui, car ma voisine est compétente en astrologie.
2 Non, car il s'agit de généralisations hâtives.
3 Oui, car il est fondé sur des faits.
4 Non, car il repose sur des associations fausses.
Réaction 48


L'association fausse ne manque pas de solidité mais de pertinence. Consciente, elle est de mauvaise foi et tourne au prétexte.

Prétexte.

C'est l'arme des pouvoirs en place, qui dictent leurs volontés en se parant de raisons très solides, apparemment décisives, mais cette force est justement un signe de faiblesse, car les motifs ne peuvent pas être totalement irréfutables et, le plus souvent, s'ils en ont l'air, c'est aussi parce qu'ils ne sont pas pertinents.
Des Européens ________ d'une histoire africaine sous prétexte que l'Afrique n'avait pas d'écriture.
1 affirmèrent l'existence
2 nièrent l'existence
3 nièrent l'inexistence
4 (Autre chose)
Dans un coin du plafond de son châlet d'été, Norman voit une énorme araignée. Au lieu de l'écraser, il se dit: elle attrapera des mouches. Son attitude est ______.
1 un prétexte pour continuer sa sieste
2 adulte: il pèse le pour et le contre
3 normale
4 (Autre chose; dire quoi)
Les concertos de Jean-Chrétien Bach, le fils du grand Jean-Sébastien, sont sûrement magistraux. "Tel père, tel fils." Ce proverbe semble devoir démontrer une allégation. La démontre-t-il?
1 Non. Un proverbe ne s'applique pas nécessairement à tout coup.
2 Non. Les proverbes sont d'une vérité douteuse.
3 Oui. Un proverbe est une vérité d'expérience.
4 Probablement. Le proverbe codifie l'expérience populaire, la "sagesse des nations".
Réaction 49


La réfutation du prétexte consiste à reprendre, comme jadis Socrate, les choses au tout début : que fallait-il démontrer? Il apparaît alors bientôt que l'allégation ne correspond pas à ce qui est en litige. Citer un proverbe peut-il servir de démonstration?
L'étude de la logique est importante. Lequel des arguments suivants vous semble le mieux appuyer cette idée?
1 Lewis Carroll s'est intéressé à la logique et a même écrit un livre sur ce sujet.
2 Depuis les Grecs, l'étude de la logique a toujours fait partie de la formation de base.
3 Bertrand Russell affirme que la logique est un préalable de toute démarche intellectuelle.
4 La logique nous fournit des instruments qui donnent à notre pensée pertinence, cohérence et richesse.
Réaction 50


L'argument d'autorité est le prétexte le plus répandu... Ex.: Impossible de corriger la transaction : elle est dans l'ordinateur. (L'autorité de l'ordinateur... vient de nous. Il est vrai qu'il y a des cas de force majeure.)

Le prétexte se laisse volontiers introduire par d'ailleurs.
Vous savez bien que ce journaliste d'ailleurs a des idées floues. Il a écrit l'autre jour: "L'avantage d'être de nulle part, c'est qu'on peut toujours se prétendre d'ailleurs; d'ailleurs, c'est mon cas." Lequel de ces d'ailleurs a une valeur argumentative?
1 Le premier.
2 Le deuxième.
3 Le troisième.
4 Le premier et le troisième.
Réaction 51


Plus difficile à déceler car purement logique, une autre source d'erreur est la pétition de principe.

Pétition de principe.

C'est un argument qui tire sa solidité de sa seule conclusion. Ex. Pour ne pas être malade, la meilleure chose à faire est de toujours être en forme. (Faire de l'exercice, oui, mais être en forme suppose déjà qu'on ne soit pas malade).
Évidemment qu'il craint qu'on se moque de lui : il a peur de tout.
Il l'a fait exprès parce qu'il est méchant.


Que peut valoir une preuve qui implique d'avance ce qu'elle est censée démontrer?
Un général du Moyen-Orient tient le discours suivant: "La supériorité culturelle et psychologique de notre peuple prouve sans conteste la pureté de notre ethnie. Dois-je souligner que nous devons cette supériorité intellectuelle à la pureté biologique de notre race? Évitez donc, mes frères et mes soeurs, tout métissage!" Quel est le défaut de ce raisonnement?
1 La généralisation hâtive.
2 Le cercle vicieux.
3 Le procès d'intention.
4 L'appel au préjugé.
Un avocat: "La femme n'est-elle pas la gardienne du foyer et de la famille? Ne doit-elle donc pas demeurer à la maison?" Sommes-nous devant un véritable raisonnement?
1 Non, car on ne démontre pas ce qui est à prouver.
2 Non, car on suppose au principe du raisonnement la conclusion même.
3 Oui, car la femme est génétiquement adaptée à cette situation.
4 Oui, car il est énoncé par un homme de loi.
Å la devanture d'une boutique de mode. «Conseil à nos clientes. Pourquoi dépenser ailleurs ce que vous pouvez dépenser ici?» Quelle est votre réaction à ce conseil?
1 Le trouver bon.
2 Le trouver mauvais.
3 "Ce n'est pas un conseil".
4 "Il y a pétition de principe dans le raisonnement".
Réaction 52


Partant d'une universelle invérifiable, toute déduction ne fait-elle pas supposer son principe? À moins que l'on ne puisse remonter plus loin... Mais la pétition de principe est une erreur plus rare et plus subtile. Elle s'appelle aussi cercle vicieux.

Trop logique pour être vrai.

Même la parfaite logique peut avoir ses points faibles.
Dans le cadre d'une campagne pour la vente libre des armes à feu, on placarde des affiches portant le slogan suivant: "Si avoir des armes est hors-la-loi, alors seuls les hors-la-loi auront des armes." Cet énoncé comporte ________.
1 un jeu de mots
2 un syllogisme
3 un appel à l'autorité
4 un raisonnement fallacieux
Réaction 53


Le jeu de mot renforce ici l'expressivité du raisonnement mais celui-ci est logique, non? Irrécusablement! Hé bien... c'est là que résidera sa faiblesse. Parce que la réalité déborde la logique. Celle-ci doit se mettre au service de celle-là, et non l'inverse (comme le font sentir trop souvent les administrations). Comment cela, dans le cas présent? Laisser des armes à tout le monde empêche de lutter contre ceux qui abusent des leurs. Si les armes sont illégales, on pourra sans doute moins se défendre (par les armes), mais il deviendra possible d'en prévenir l'usage.

La logique peut donc mener à des conclusions inattendues.
Cherchez l'erreur dans le raisonnement suivant. "S'il y a des maîtres et des élèves, c'est que ces derniers peuvent avoir de la difficulté à comprendre. Mais pour bien enseigner, il faut comprendre l'élève, c'est-à-dire comprendre qu'on puisse ne pas comprendre. Or on ne peut pas à la fois comprendre et ne pas comprendre! "Ceux qui comprennent ne comprennent pas qu'on ne comprenne pas" (Valéry). Conclusion: un bon enseignant doit être ignare..."
1 "Accident inverse". On conclut à partir d'un cas exceptionnel. Comprendre l'élève n'est pas la première tâche de l'enseignant.
2 "Glissement de sens principal". Comprendre n'est pas pris dans le même sens du début à la fin.
3 "Sorite". Avec un raisonnement aussi long, éviter une erreur est impossible.
4 "Généralisation hâtive". Tous les doués ne sont pas bornés en pédagogie.
Réaction 54


Retenons que les idées sont analogues à un éclairage projeté sur tel ou tel aspect de la réalité. Celle-ci ne leur obéit pas entièrement. Elle les déborde (et réciproquement). L'absolu est sans doute du côté des idées (par leur simplicité et leur clarté) mais l'infini est du côté des choses (par leur multiplicité et leur durée). Quant au bien, il est du côté de notre liberté. Aucun de ces aspects ne subsiste indépendamment des autres. Le raisonnement ne jouit pas d'un statut privilégié, n'en déplaise à M. Teste (surnom que se donne modestement Valéry). Il ne suffit donc pas de réfléchir, et la réflexion peut engendrer des illusions.

Illusions.

On a pu identifier un certain nombre de causes d'erreur dans les raisons, notamment les «illusions» qui nous autorisent à sortir trop aisément de la réalité présente, laquelle se renouvelle, continuellement.
Si les autres pays francophones parlent le français standard, le Québec peut très bien faire de même. On a ici ________.
1 un argument a pari (on s'appuie sur des cas comparables)
2 un lieu de l'essence (le français est un)
3 un appel au grand nombre (on peut bien faire comme les autres).
4 une illusion réaliste (on fait comme si la situation n'était pas voulue ou causée par qqch.)
Réaction 55


Dans l'illusion réaliste, tout se passe comme si la signification était limitée à l'idée que l'on veut se faire, trop simple, sans tenir compte de la réalité, c'est-à-dire des idées possibles, notamment celles des autres.
Votre développement, vos buts, vos rêves seront ceux de notre gouvernement de déclarer récemment un candidat élu à la présidence d'une grande démocratie.
1 Discours électoral tout à fait normal, je vous assure.
2 Absurdité. Le gouvernement ne peut réaliser les rêves de personne, ou presque.
3 Mensonge par implication. Les électeurs ne peuvent avoir tous les mêmes buts ni les mêmes rêves.
4 Banalité naïve.
Réaction 56


On joue sur l'espoir naïf des masses et celles-ci se laissent entraîner.

Le confiance dans le progrès est aussi de la naïveté en face de l'avenir.
Un représentant du Conseil canadien de l'énergie nucléaire (C.C.E.N.) déclare: "La recherche nucléaire ne sera pas arrêtée à cause du problème de l'entreposage des déchets atomiques. Nous trouverons demain la façon de rendre ces déchets inactifs." Il y a dans cette assertion ________.
1 une illusion rétrospective
2 une illusion réaliste
3 une fuite en avant
4 le retour d'un âge d'or, du paradis perdu
Réaction 57


Il y a aussi des illusions qui proviennent des organes des sens, ou encore de l'inconscient, comme le lapsus.
A la devanture du libraire, j'aperçois une nouveauté, avec un titre en anglais: monkey (Singe). Mais non: j'ai mal lu. C'est money (la Monnaie). Un livre d'économie politique. Que s'est-il passé?
1 Hésitation toute naturelle. Les deux mots sont assez proches.
2 C'est un tour que me joue mon univers implicite. Je rêvais de l'Afrique.
3 Je devrais porter mes verres de contact.
4 Je me défie des phénomènes économiques et me persuade que les banquiers sont de mèche.
Réaction 58


Quelle est alors la clé de la vérité et du succès? Y en a-t-il une?
Réaction 59


Évidemment non, puisque c'est à chacun qu'il incombe de refaire le monde, pour lui et avec d'autres... Ainsi, par exemple, la bonne façon de suivre notre cours, ce ne serait pas de saisir un arsenal de précautions contre la multitude des erreurs possibles : ce serait simplement de faire son miel des arguments qui conviennent à vos propres besoins. Le temps ne peut pas se refermer d'avance sur lui-même sans enfermer tout le monde en lui (conservatisme). On croit que le risque est trop grand, si l'on ne s'en tient pas au passé, mais ce n'est que pusillanimité et préjugé recouvrant des intérêts, collectifs ou individuels, mal compris.

Préjugés.
Si elle est belle, il y a bien des chances pour qu'elle soit conne. C'est souvent comme ça. Et si elle est conne, elle n'aurait jamais pu inventer une histoire pareille. Mais attention, si vous la trouvez laide, ça ne prouve rien non plus. Parce que si elle est laide, il y a bien des chances pour qu'elle soit brillante. C'est souvent comme ça. Et si elle est brillante, elle ne peut pas avoir tué son chum, parce qu'elle sait très bien qu'avec la tête qu'elle a, elle n'en retrouvera jamais un autre... (Foglia, dans la Presse) Les idées soulignées ________.
1 sont des préjugés
2 sont des jugements de valeur
3 sont des généralisations
4 appartiennent au discours idéologique
"Il était prévisible que son aventure tourne mal. Ne dit-on pas: qui rit vendredi, dimanche pleurera?" Quel type d'argument est utilisé ici?
1 Le recours au préjugé.
2 Le recours à la majorité.
3 Un argument logique.
4 Il n'y a pas d'argument.
Réaction 60


La difficulté, avec les préjugés, c'est qu'ils s'enracinent dans des habitudes et deviennent des sortes de postulats collectifs. On ne peut plus les dépister et comme la collectivité n'en est pas consciente, elle réagit en taxant celui qui s'en défait d'idiot ou d'immoraliste. Il y a dans la culture une pente qui entraîne presque tout le monde.

Crédulité naturelle.

On ne prend pas toujours le temps de critiquer mais c'est aussi qu'on ne l'a pas : il faut répondre, du tac au tac. Les montages des échanges sont prêts. Ils envahissent trop facilement nos discours.
Vous faites une randonnée à ski et voilà que vous vous cassez la jambe. En route vers l'hôpital, la voiture qui vous transporte glisse dans un ravin. Dans l'ambulance mandée sur les lieux, un infirmier vous installe sur une civière et déclare: Attention! Jamais deux sans trois... Vous éprouvez alors un malaise. Un troisième accident va-t-il survenir? Mais non, l'origine de cette inquiétude est identifiable: il s'agit d'une présomption ________.
1 d'habitude personnelle
2 de crédulité naturelle
3 générale
4 d'intérêt
Vous lisez que "Tidi est le seul à utiliser la formule W". Vous en concluez logiquement que ________.
1 Tide est exceptionnel
2 la formule W est exceptionnelle
3 Tide est exceptionnel parce qu'il utilise la formule W
4 (Autre chose)
Réaction 61


Se rendre sensible aux intérêts de ceux qui nous agressent de discours non sollicités, c'est déjà se libérer des textes vénaux et de leurs (fausses) implications.

Procès d'intention.

En deçà des intérêts, on suppose qu'il y a des intentions; et pour les dénoncer, il suffit de les mettre au grand jour. Mais aller trop loin dans ce sens risque de compromettre la cause.
N'ayant pas obtenu de poste permanent, une étudiante s'en plaint dans un journal local et écrit notamment: "Les lettres n'intéressent personne, ne servent à rien, c'est bien connu". Cette phrase est ________.
1 une conclusion tirée de sa situation
2 un argument qui prouve l'injustice de la société dans laquelle elle se trouve
3 un procès d'intention
4 (Autre chose)
Réaction 62


S'il n'est possible de se blanchir d'une accusation qu'en donnant de soi d'avance l'image d'une personne juste, il est cependant assez facile de réfuter un procès d'intention généralisé. Il suffit d'amplifier encore ou de souligner l'excès d'amplification. «Faut-il que vous vous sentiez la victime d'un complot universel?»

Le dilemme est moins facile à réfuter.

Le dilemme, et sa réfutation.

Dans un dilemme, quelle que soit l'issue, la conclusion est la même. Mais il y a de faux dilemmes. Heureusement. C'est par là qu'ils se réfutent. Peut-être n'y a-t-il, au fait, que de faux dilemmes.
«Voulez-vous que je la tue ou que je me tue? C'est plus fort qu'elle et c'est trop fort pour moi...» explique le mari trompé (M. Jouhandeau, Chaminadour, p.11).
1 Deux arguments sont rapportés à deux visées, respectivement.
2 Il n'y a qu'un seul argument (l'incapacité).
3 Dilemme.
4 Argument cornu (qui oblige à choisir entre deux options défavorables).
Réaction 63


Le dilemme se dénoue, par conséquent, quand on peut montrer qu'il existe une troisième voie (celle qui deviendrait la thèse dans une problématique). Reste évidemment à développer cette troisième voie; mais l'important, pour sortir du dilemme, est simplement de dégager une direction à prendre. L'indifférence est une issue généralisable (on le voit par le succès du bouddhisme), mais comment la pratiquer? L'idée ne suffira pas. Il reste donc à préciser, à bâtir l'avenir. On part de la nature du problème, et de sa volonté particulière.
Comment en sortir? Maintenant que je suis enceinte, il ne me reste que deux choix: ________.
1 l'avortement
2 le mariage
3 (1 et 2)
4 (ni 1 ni 2)
Réaction 64


Le dilemme est une forme, mais loin de nous enfermer, il peut se révéler propice à l'analyse, c'est-à-dire à la découverte de solutions inédites.

Nier aussi peut servir.

Quelques autres réfutations.

On distingue l'objection, l'opposition, l'énantiose (antithèse spéculative), la concession... et la contre-attaque (rétorsion). Exemple d'objection : -- L'euthanasie est un homicide. -- Même à la demande du patient?
«L'euthanasie est un homicide. Avec le consentement du malade, c'est un suicide.»
1 Ce sont les deux majeures d'un raisonnement implicite qui continue avec la mineure: Or l'homicide et le suicide sont des crimes et la conclusion: Donc l'euthanasie est un crime.
2 Ce sont des définitions tronquées, sans spécifiques.
3 Surenchère de soulignement, d'allure irréfutable.
4 Réfutation d'une objection implicite.
Réaction 65


Il y a opposition sur le fond ou sur l'idée (énantiose). L'opérateur est même si, ou simplement si.
______ la démocratie est la forme de gouvernement des pays les plus développés, elle existe depuis plus de mille ans.
1 Bien que
2 Même si
3 (Selon la nuance de sens)
4 (Autre chose)
Réaction 66


Avec malgré tout, l'opposition est vue sous un angle inverse. Même si un partie de l'humanité meurt de faim, la population double tous les trente-cinq ans. Si on emploie malgré tout, il faut le placer devant la principale et faire de la subordonnée une indépendante.
Une grande partie de l'humanité meurt de faim. _____, les instances politiques ne sont pas toujours conscientes du problème.
1 Évidemment
2 Sans doute
3 Certes
4 Malgré tout
Réaction 67


Par ailleurs, quand on ne peut réfuter, il ne reste qu'à lancer une contre-attaque. Il y a divers moyen de contre-attaquer. Ce sont la contre-accusation (Vous aussi, vous...), la récrimination (il m'accuse de... alors que c'est lui qui...), la métastase (C'est à cause de lui que je...; c'est sa faute si...), l'antanagoge (Et lui, il...) et la rétorsion (Vous dites que... alors que vous...)
On racontait, de Léopold II, roi des Belges, l'anecdote suivante. Le nonce apostolique avait tenté de le reprendre benoitement sur le chapitre de la fidélité conjugale. Il lui rétorqua: "C'est curieux, Excellence, mais on m'a rapporté que vous aussi, vous auriez une liaison..." La répartie montre surtout ________.
1 que le roi méritait ce reproche
2 l'optimisme du nonce (qui pensait avoir assez d'ascendant sur le monarque pour pouvoir aborder le sujet)
3 que le roi connaissait la rhétorique (rétorsion: retourner l'accusation)
4 qu'il était psychologue (deviner que la démarche ne s'appuie que sur des on-dits et le faire sentir en plaçant le nonce dans la même situation)
Réaction 68


Mais pourquoi, penseront les pacifistes, pourquoi les antagonismes, les réfutations, les attaques verbales? Le monde est-il ainsi fait qu'on ne doive que polémiquer? C'était la position d'Héraclite : , comme de Hegel (le grand soir). Est-ce la vôtre?
Réaction 69


La paix est accessible comme résolution de conflits moyennant le succès d'une troisième voie auprès de belligérants. Il y a là un espace à remplir par quelqu'un qui ne peut être que vous, cette personne, ici, maintenant, prenant conscience de la situation, travaillant dialectiquement à la résoudre, chef d'oeuvre rhétorique...

APPLICATION 1. Éristique interne.

La dissertation parle des oppositions mais sur un ton neutre, qui place auteur et public au-dessus de la mêlée. Les arguments sont présentés plus abstraitement. On dirait un traité de paix. Avec l'éristique, on est plongé dans le feu de la discussion. La mise en scène des antagonistes sous la forme de personnages typés, qui se rencontrent et interagissent, permet de produire du texte concret et frappant, susceptible de convaincre un public plus large et de ressembler à ce qui se voit dans les moments cruciaux de l'évolution de nos sociétés.

On a vu, dans la Problématique, l'importance d'une mise en discussion des visées de chaque antagoniste. Qu'il soit possible (et même plus sûr) d'inventer leurs arguments et leurs discussions (en ne relevant que les preuves sur le fiches doc), on a pu le constater dans l'Argumentation. L'éritistique a abordé le repérage de points faibles qui ouvrent sur des réfutations. Il y a donc débat et l'arène de ce débat, c'est vous, c'est l'esprit même du rédacteur, c'est son texte, car ce qu'il rédige doit contenir les questions que se posent les auditeurs (ou qu'il entend les amener à se poser). La valeur des preuves comme celle des arguments importe, et se retrouve dans le moindre détail de la formulation. Elle sera d'autant plus vive et convaincante qu'elle ressemblera davantage à ce qui peut survenir réellement, lors d'un panel, à la télé, dans un lieu public, voire privé (mais qui serait filmé).

Des trois derniers chapitres, vous allez ici pouvoir extraire tout le suc par une application éristique. Celle-ci met en scène les luttes internes dont vous êtes le théâtre. Il s'agit d'entrecroiser les arguments de vos antagonistes et finalement les vôtres (gardez-les pour la fin, afin de garder le dernier mot).

Donc, comme dans un panel controversé, vous allez mettre en scène des représentants typés et leur faire défendre leurs positions respectives avec leurs arguments les plus sûrs, ou leurs ruses traditionnelles. Les réfutations ne sont pas moins nécessaires que les preuves. Les opérateurs sont toujours de mise: ils clarifient la fonction de chaque allégation. Comme la semaine dernière: une dizaine d'opérateurs, diversifiés, recherchés, nouveaux et rares, mais adéquats. (Vous ne vous posez pas encore trop nettement la question du plan, qui fera l'objet du chapitre suivant.)

Bien entendu, un tel effort vers le concret suppose une documentation précise et très étendue. Ex. Les impressionnistes furent-ils des décadents ou des visionnaires? La facture un peu bâclée de certaines toiles pourra servir d'argument contre eux mais elle peut devenir, au salon des refusés, une preuve d'appartenance au mouvement. Ce qui importe ici est de mettre en scène l'argument, non de restituer tout le décor. Vous vous contentez donc de quelques épisodes, limités à des échanges de répliques.

Longueur de l'application: une page. Titre: Du tac au tac. Exemple.

Un critique, à la porte du salon des refusés : -- Courbet au moins savait peindre!

Un marchand de tableaux: -- Il ne suffit pas de peindre. Il faut faire sentir la lumière. Voyez Monet. Voyez van Gogh!

(On peut continuer en mettant en relief les jugements de valeur implicites.)

-- Un drogué...

-- Un homme sans préjugés. La peinture n'est plus pour les bourgeois...

Autre exemple. Domaine: la sorcellerie. Fiche de départ: «Entre 1587 et 1593, une battue sur 22 villages de Westphalie a conduit aux bûchers de l'Inquisition 368 sorcières». Analyse: argument de la quantité. Visée: barbarie de la répression, excès de l'injustice, condition féminine écrasante.

Antagonistes. Le clergé en face des féministes. Mais plus personne ne peut soutenir aujourd'hui l'Inquisition. Trouver alors un contexte contemporain où, mutatis mutandis, la fiche puisse tout de même servir. Prenons une jeune-fille qui veut allumer dans sa chambre un cierge odoriférant et mettons en face d'elle sa mère, rationaliste. -- Pas de ça chez moi petite sorcière! -- C'est ça. Tu vas me dénoncer au clergé qui me fera brûler vive comme en 1587! -- Voyons, Éva, tu sais que je te dis ça pour t'éviter de sombrer dans l'obscurantisme. -- Un cierge, c'est de la lumière. -- Le règne du clergé, la grande Noirceur, la femme au foyer avec une ribambelle d'enfants... -- On l'a tournée, cette page. -- Pourquoi ces tatouages, ces parfums? -- Tu ne comprendras jamais! (Dilemme) -- Mais explique-moi. Qu'est-ce que je devrais «comprendre»? -- Que tu ne sais pas tout!

Placez dans la fenêtre ci-dessous un dialogue relevant de votre domaine.
Réaction 70


APPLICATION 2. Intervention en assemblée.

Prendre quelques pages du Journal des débats ou enregistrer quelques minutes des séances parlementaires retransmises par la télé. Se concentrer sur les questions et les interventions des députés. Comment s'insèrent-elles dans l'agenda? Quel en est le style et le contenu. Y a-t-il des procédés favoris?

Réaction 71


Le prochain module, les Genres normatifs, vous introduira à la confection de textes politiques et religieux.)

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