.

L'ACTUALISATION

La forme actualise.

Les variations de forme sont les terminaisons, héritage du latin. Elles ne sont plus seules à remplir leur rôle puisque des mots placés avant le lexème ont pris la relève (le pluriel, par exemple, s'entend davantage à l'article). Mais ce rôle, en quoi consiste-t-il?

À actualiser, à viser le référent. Par exemple, le s du pluriel marque l'existence de plus d'un objet dans l'environnement des locuteurs. Suite à l'actualisation, le lexème passe-t-il du rang de concept a priori à celui de réalité a posteriori. «Amour!» sans s est un mot doux intime; «Mes amours!» a plusieurs destinataires. Voyons quel est le sens de ces variations et quels sont leurs emplois selon les contextes.
Il n'était pas facile de___ débrouiller tout seu___.
1) se, l 2) se, ls 3) (Rien), l 4) (Selon le sens)
Réponse Selon le sens. Mais ... de tout débrouiller seul(s).
Et ... de se débrouiller tous, seuls. Ou ... de nous débrouiller seuls.
Rem. Avec débrouiller sans se ("démêler"), l'objet direct du verbe est tout, pronom.
Mais Avec se débrouiller ("se tirer d'affaire par ses propres moyens"), tout, adverbe, souligne seul.
Et Seul est au singulier ou au pluriel suivant que le sujet (implicite) est une ou plusieurs personnes. Comparez Il n'était pas facile que je me débrouille tout seul et ... que nous nous débrouillions tout seuls.
C'est à Montebello que se sont réunis les représentants des gouvernements fédéral et provinci___.
1) al 2) aux 3) (Selon le sens) 4) (Autre chose)
Rép. Selon le sens: provincial s'il n'y a qu'une province à la réunion; provinciaux s'il y en a plus d'une.
Ou du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial
Et du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux
Règle Quand on a affaire à un tout composé de deux unités, deux qualificatifs au singulier peuvent se rapporter à un substantif au pluriel (un seul article au pluriel, et une seule préposition éventuellement). Ex. Les quinzième et seizième siècles, les premier et deuxième actes (parce qu'ils se suivent), les gouvernements fédéral et provincial...
Mais Ici, l'un des deux peut être au singulier ou au pluriel selon le sens que l'on veut donner à la phrase.
Et Son argumentation reflète une connaissance approfondie des codes civil et pénal.

Voici les courbes obtenues dans les cégeps.
QCM  2974                     # 59       |100%              ·
Lot  Québec   Cycle 14         Valide    |   |              ·
        %      Niveau    Discriminance   |   |              ·
3*      23      2.27      0.34           |   |              ·           111
4       01      2.17      0.34           |   |              · 1111111111
1       65     -8.05      0.15           |   |       111111111
2       12      0.00      0.00           |   |1111111       ·
-----------------------------------------|   |              ·
C'est à Montebello que se sont réunis    |   |              ·
les représentants des gouvernements      |   |              ·           444
fédéral et provinci___.                  |50%|·················33333
1)     al                                |   |              ·      333
2)     aux                               |   |              ·    33
3)     (Selon le sens)                   |   |              · 333
4)     (Autre chose)                     |   |            3333
                                         |   |         333  ·
                                         |   |    33333     ·                
                                         |   |3333          ·

La première strate de compétence est à un niveau élevé, 2.27 écarts-types, et elle discrimine bien (0.34). Ne s'y trouvent que 23% des répondants. Attirer ici l'attention de l'ensemble du groupe est donc utile. Et que se passe-t-il? Une différence importante. Ou bien plusieurs gouvernements provinciaux sont présents, ou bien un seul (celui où se trouve la ville de Montebello). Petite différence de forme, référent tout autre, car c'est une question d'actualisation.
Nous empruntions une étroite ruelle, cach__ par un dédale de hangars et de clôtures.
1) ée 2) és 3) ées 4) (Selon le sens)
Rép. Selon le sens.
Mais La ruelle, cachée par un dédale de hangars, était notre royaume.
Et Nous empruntions une étroite ruelle, cachés (cachées) par nos capes de pensionnaires.
Règle Quand un sujet, dans sa forme, ne marque pas le masculin ou le féminin, le singulier ou le pluriel, le verbe s'accorde en genre et en nombre avec le référent (le sujet visé dans le monde réel).

Voici le graphe des statistiques obtenues.
QCM  2102                     # 85       |100%              ·
Lot  Québec   Cycle 14         Presque   |   |              ·         111111
        %       Niveau    Discriminance  |   |    11111111111111111111
3       01      9.51      0.29           |   |1111          ·
4*      22      2.18      0.34           |   |              ·
1       75    -15.86      0.14           |   |              ·
2       02      0.00      0.00           |   |              ·
-----------------------------------------|   |              ·
Nous empruntions une étroite ruelle,     |   |              ·
cach__ par un dédale de hangars et de    |   |              ·           4444
clôtures.                                |50%|·················44···
1)     ée                                |   |              ·      444
2)     és                                |   |              ·    44
3)     ées                               |   |              · 444
4)     (Selon le sens)                   |   |            4444
                                         |   |         444  ·
                                         |   |    44444     ·
                                         |   |4444          ·              3
                                         |   |              ·    3333333333

Les trois-quarts optent pour cachée, estimant qu'il s'agissait d'orner son style pour parler d'une simple ruelle mais les plus futés (deux écarts-types au-dessus de la moyenne) prennent Selon le sens, voyant bien que nous pourrait désigner des héros féminins aussi bien que masculins et que ce sont eux qui cherchent peut-être à se cacher.

Les mots grammaticaux reçoivent les mêmes marques que les mots auxquels ils s'attachent : le e du féminin, le s du pluriel pour le nom, l'adjectif, le pronom; le nt pour le verbe. Ces marques sont des variations de forme (en termes savants : des variations morphologiques) mais ce qu'elles disent est l'actualisation, avec de la redondance, et cela demande de la cohérence (comme on l'a vu ci-dessus, au chapitre Accord du verbe). Ainsi le féminin pluriel (ces belles fillettes) sera visible à trois endroits : l'article, le nom, le qualificatif.
La cohérence des accords pose des problèmes notamment pour le complément du nom, où la logique semble avoir eu son mot à dire.

Accord du nom dans le complément du nom.

Faut-il accorder le nom complément du nom? Ou le laisser au singulier? Une brosse à dent(s)?

La tendance est au singulier quoique la brosse à dents semble devoir actualiser plus d'une dent, mais faut-il actualiser, alors que justement on évite d'employer l'article? Partons des grammaires et tentons d'éclaircir l'imbroglio.
Règle On ne met au pluriel le nom complément d'un autre que quand le sens exige vraiment le pluriel.
Explication Des blocs de papier à lettre même si un seul suffira pour de nombreuses lettres, parce que c'est du papier. Des contes de fée en dépit du fait que le nombre de fées qui vont intervenir n'est pas limité à une seule. Papier à dessin, à musique parce qu'il sert à faire du dessin, de la musique. Ce sont des ensembles puisqu'on en prend une partie.

L'examen approfondi de quelques cas divergents débouche peut-être sur une explication naturelle.
Il s'est spécialisé dans la construction des maisons de briqu__.
1) e 2) es 3) (Au choix, mais de préférence 1) 4) (De préférence 2)
Rép. Au choix, mais de préférence brique.
Mais Il vous y fera une cave à liqueurs (= pour des liqueurs).
Ou Les enfants ont construit une maison de briques sèches (c'est-à-dire en empilant des briques, sans les cimenter). Et Des maisons de ciment, de pierre. Mais Des toits de bardeaux.

Ces exemples ne font-ils pas "bouteille à encre" plus que jamais? Voici le graphe des réponses à Paris puis dans les cégeps.
QCM  2707                                100%|              ·
Lot  FRpa0A   Cycle 28         Valide    |   |              ·
      %      Niveau    Discriminance     |   |              ·
3*    14      4.64        0.23           |   |              ·              1
4      7      3.60        0.22           |   |              ·           111
1     38     -0.48        0.49           |   |              ·         11
2     41      0.00        0.00           |   |              ·      111
-----------------------------------------|   |              ·    11
Il s'est spécialisé dans la              |   |              · 111
construction des maisons de briqu__.     |   |              11
1) [2] e                                 |0.5|············11················
2) [1] es                                |   |         111  ·           4444
3) [3] (Au choix, mais de préférence 1)  |   |       11     ·      444443333
4) [0] (Au choix, mais de préférence 2)  |   |      1       · 4444433333
                                         |   |    11      444433333
                                         |   |1111444444443333
                                         |   |444433333333  ·
                                         |   |3333          ·
QCM  2707                     # 469      |100%              ·
Lot  Québec   Cycle 14         Valide    |   |    22222222222222222222222222
      %       Niveau      Discriminance  |   |2222          ·
3*    20        2.52      0.35           |   |              ·
4      6        1.89      0.35           |   |              ·
1     30      -15.97      0.01           |   |              ·
2     44      -22.00      0.13           |   |              ·
-      1        0.00      0.00           |   |              ·
-----------------------------------------|   |              ·              4
Il s'est spécialisé dans la              |   |111111111111111111111111114443
construction des maisons de briqu__.     |50%|················44333·
1)     e                                 |   |              ·      44433
2)     es                                |   |              · 44444333
3)     (Au choix, mais de préférence 1)  |   |              4433333
4)     (Au choix, mais de préférence 2)  |   |            4433
                                         |   |       4433333·
                                         |   |    44433     ·
                                         |   |3333333       ·

On observe beaucoup de ressemblance (l'ordre des strates, les pourcentages) et comme différence frappante, la discriminance de la strate 1, très forte à Paris (0.49) et nulle au Québec (0.01). Ceux qui appliquent la règle sont donc aussi nombreux mais au Québec, ils sont distribués à tous les niveaux, tandis qu'à Paris, il y en a plus parmi les meilleurs que parmi les autres, d'où le niveau moyen plus élevé. Mais de part et d'autre les plus habiles sont les tolérants, qui perçoivent la double interprétation sans doute : les briques ou de la brique.

En théorie linguistique, c'est l'occasion de rappeler que le singulier est non marqué par rapport au pluriel. Le pluriel exclut le singulier parce qu'il est l'élément marqué du système des nombres. Si on met le pluriel, il doit y avoir une raison. On peut opter pour le singulier uniquement parce qu'on n'a pas de raison de mettre le pluriel. Le pluriel indique une pluralité mais le singulier n'indique pas l'unicité comme telle : en effet, il peut aussi désigner l'idée de la chose, de façon générale. (L'homme est un animal social.)

A-t-on une bête à cornes parce qu'on parle toujours de plusieurs cornes (exception: la licorne, mais elle n'est pas dans le domaine agricole)? Pas exactement. Le complément du nom est une idée et n'a pas besoin d'actualisation, en principe. Il n'y en a que si elle est essentielle, si elle appartient à l'idée. C'est le cas des cornes de la bête, car la bête n'est pas en relation avec une corne mais avec les deux. La qualité, par elle-même, n'a pas besoin d'actualisation, mais parfois, certaines qualités, doivent être mises au pluriel parce que cela fait partie de l'idée. Ce qui caractérise le bétail est d'avoir des cornes. Ce n'est pas le cas dans une maison de brique. Il y a évidemment plus d'une brique dans le référent mais dans l'idée, c'est global, c'est de la brique.
Les répondants québécois ont bien vu la subtilité, validant la réponse Au choix mais de préférence brique. À Paris, les strates sont presque identiques et ce sont aussi les plus faibles qui optent pour ce pluriel trop exclusivement concret.
Le lien avec le référent se fait donc de différentes façons, qui sont des perceptions collectives du fonctionnement de la langue dans les divers contextes. Dans l'exemple ci-dessous, qu'est-ce qui est déplorable? Les choses ou leur état?
Cet état de chos___ déplorabl___ ne saurait durer.
1) e, e 2) e, es 3) es, e 4) es, es
Rép. choses, déplorable
Mais Ce sont des choses déplorables, mais qu'y pouvons-nous? C'est peu de chose; en tout état de cause, il m'est impossible de me prononcer. C'est un état de fait.
Rem. État de choses: toujours un s à choses. Par ailleurs déplorable se rapporte à état et non à choses.

Seulement 19% des répondants font cette analyse et ce sont les plus habiles. 54% met chose au singulier et dès lors, par cohérence, déplorable aussi. Les 25% qui mettent le pluriel à déplorable sont les plus faibles. En somme, c'est le pluriel de choses qui est la principale difficulté. Le sens exige-t-il vraiment le pluriel? Sans doute en vue de concrétiser un peu le mot chose, si vague sans actualisation.
Item 1808                     # 922      |100%              ·
Lot  QCaccA   Cycle 14         Valide    |   |       44444444444444444444444
      %         Niveau    Discriminance  |   |4444444       ·
3*    0.19      2.58      0.34           |   |              ·
+     0.01      2.45      0.35           |   |              ·
1     0.54     -5.49      0.11           |   |              ·              1
4     0.25    -21.72      0.13           |   |              ·    1111111111
2     0.01      0.00      0.00           |   |         1111111111
-----------------------------------------|   |  1111111     ·
Cet état de chos___ déplorabl___ ne      |   |11            ·              3
saurait durer.                           |50%|··················333·
1)     e, e                              |   |              ·         33
2)     e, es                             |   |              ·    ++333
3)     es, e                             |   |              · 33333
4)     es, es                            |   |              33
                                         |   |         33333·
                                         |   |       33     ·
                                         |   |3333333       ·
                                         |   |              ·

Ce n'est pas la chose (il faudrait savoir laquelle) mais les choses (ce qui est là) qui sont dans cet état.

Les actualisateurs.

Les terminaisons ne sont pas les moyens d'actualiser les plus évidents et ce sont de petits mots placés devant le lexème qui font tout le travail, en français. Mais quelle est la nature de ces mots qui marquent un lien avec l'environnement?

L'article, le pronom : des mots grammaticaux. Pour le nom, outre les articles, il y a les adjectifs possessifs, démonstratifs, etc. ; parallèlement, pour le verbe, il y a les pronoms personnels, démonstratifs, etc. Que diriez-vous : Ont-elles (son / leur / leurs) bouquet(s)?

Avec leur, ce sera chacune le sien. Avec son, celui de quelqu'un(e) d'autre. Avec leurs... il y a plusieurs bouquets, sans que l'on puisse savoir à qui ils sont. Chaque phrase tire le parti qu'elle peut des paradigmes présents dans la langue et des éléments de l'environnement, à rendre présents par l'actualisation.
Grosso modo, ce chapitre sur l'actualisation porte sur ce qu'on appelle souvent les déterminants. On a vu que tout groupe syntaxique actualisait son noyau lexical avant de le lier au reste de la phrase. Les déterminants actualisent un noyau nominal (le lion). Y a-t-il des actualisateurs pour les qualifiants? Et pour les verbes?
10 

L'actualisation du noyau lexical ne concerne pas seulement le nom. Certes, le qualifiant, adjectif ou adverbe, se passe d'actualisation (puisqu'il suffit d'un concept pour prédiquer) mais le verbe, lui, a besoin d'une actualisation si poussée qu'elle devient une actanciation (je te le dis) Pour cela, il prend des terminaisons (-ons, -ez, -ent au pluriel) mais surtout, il s'entoure de morphèmes (pronoms personnels).

Le système des morphèmes du verbe est-il très différent de celui du nom? Rencontre-t-on auprès des deux les mêmes mots grammaticaux?
11 

Le, la, les sont pronoms ou articles. Peuvent aussi servi dans les deux cas : un seul, aucun, nul, plusieurs, beaucoup, tout, ce, certains, certaines, même, et les relatifs lequel, laquelle, lesquels, lesquelles.

Il y a plus d'actualisateurs pour le verbe que pour le nom parce que l'actanciation va plus loin que l'actualisation. Elle met en jeu des fonctions (sujet, objet, ...) comme on le verra plus loin. Pour comprendre l'actualisation, il faut d'abord la situer dans son lieu, qui est le groupe syntaxique, donc une dimension intermédiaire entre la phrase ou l'acte de parole et le phonème ou la lettre : le plus souvent, une syllabe. On se souvient de la définition du groupe syntaxique, qui a été délimité lors de l'étude des formes verbales. Qu'est-ce qu'un syntagme?
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Un groupe de mots ayant une fonction dans le co-texte. Le groupe syntaxique est délimité par un allongement de la syllabe finale, ce qui en fait un seul "mot phonétique". Sa définition est plus aisée, et son identification plus facile, oralement, que celles du mot et de la phrase. Seules les interjections échappent à la définition de la cellule syntaxique, car elles échappent à la syntaxe.

La phrase est souvent prise pour un acte de parole (d'où l'idée de «mot-phrase») et le mot est identifié avec l'unité graphique. Isoler des mots phonétiques est un progrès important dans l'analyse du texte car on détient ainsi des cellules syntaxiques, susceptibles de déplacement et de combinaison, ce qui serait la meilleure façon d'entamer une analyse qui débouche sur des catégories constantes, critériées par leur forme et leur fonction. En voici un exemple.

Le député! est un groupe de mots ayant une fonction (un groupe syntaxique) et aussi une phrase, exclamative (un acte de parole avec sa fonction énonciative), ou encore, on peut dire que c'est une phrase nominale (c'est-à-dire sans verbe). Mais tout cela n'est possible que grâce à cet assemblage d'un vocable, député, qui est un mot lexical, avec un mot grammatical tout léger (une syllabe muette), le.

On peut dire que l'actualisation est ce qui fait du mot un syntagme. Elle se réalise par la présence d'un morphème, mot grammatical qui donne une forme, et qui est donc un actualisateur. Mettre le devant député, c'est placer la notion véhiculée par le lexème dans un environnement par lequel l'ensemble va pouvoir viser qqch. de réel, un référent. Quel environnement? L'environnement de la planète? Celui de quoi? Ou de qui?
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Celui de quelqu'un qui profère, sur le ton approprié, ce mot, cette phrase. En s'écriant : Le député! On sait déjà de quel député il s'agit, probablement. Si on ne le savait pas, on aurait dit autre chose (Un par exemple, ou ce ou mon député!) Ici, donc, le place député dans le co-texte immédiat (ce qui vient d'être dit ou va l'être).

Cette actualisation avec l'article dit défini est sans doute la plus courante. Les liens des substantifs se font surtout avec ce qui précède ou suit immédiatement dans le texte. Appeler le article défini ne dit pas grand-chose: article = "petit mot" et défini s'oppose à indéfini (l'article indéfini est un). Évidemment, il y a bien d'autres actualisateurs qui sont soit définis (au sens large du mot) soit indéfinis. Et l'article n'est qu'un "petit mot" parmi d'autres, qui n'ont qu'une syllabe muette comme lui (me, te, se, ne, de, que). Si vague qu'elle soit, cette appellation est toutefois intéressante parce qu'elle semble donner une place précise et importante à le. Quand on parle d'article, il ne faut cependant pas perdre de vue qu'il ne s'agit que d'une des façons de sortir le lexème de son isolement. Par soi seul, il est lexical, doté de sèmes mais sans point d'attache dans le monde réel, celui de la communication actuelle. Par l'actualisation, on lui fait viser un référent et donc rejoindre quelque chose qui existe, dans l'environnement des locuteurs. Les adjectifs possessifs (mon, ton, son; ma, ta, sa; etc.) sont aussi des actualisateurs. Les démonstratifs (ce, cet, cette, ces) également. Et même les numéraux (deux, trois...). Et encore: les prétendus adjectifs indéfinis (tout, chaque, même, quelque, aucun), qui sont des déterminants, mais qui sont tout proches des qualificatifs. Il suffit de les examiner pour constater que les qualifiants et les actualisateurs se touchent (voir le tableau, en fin de chapitre ) Et il faudrait leur adjoindre les interrogatifs et les relatifs (quel, quelle, quels, quelles; lequel, laquelle, lesquels, lesquelles). On peut maintenant chercher un terme qui puisse désigner l'ensemble.

Quel terme conviendrait le mieux? Actualisateur? Morphème? Déterminant?
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Les grammaires récentes qui s'inspirent de la linguistique ont reconnu la parenté de rôle de tous ces morphèmes et elles leur ont donné le nom de déterminants. Si nous préférons celui d'actualisateurs, c'est qu'il précise davantage ce rôle; sans compter que le mot déterminant est fort équivoque, car il y a aussi des déterminants parmi les qualifiants du nom, où ils s'opposent aux caractérisants (Ex. la bicyclette bleue / la vieille bicyclette). Actualiser un mot lexical, c'est le sortir du dictionnaire, où sa forme est nue, hors contexte («Savon» quoi? Pourquoi dis-tu «savon»?) et lui faire dire quelque chose; quelque chose qui concerne les interlocuteurs («le savon», «pass'-moi l'savon»).

On actualise les noms et les verbes. Pourquoi n'actualise-t-on pas les qualifiants, pas plus d'ailleurs que les noms propres?
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Avant de répondre à cette question, remarquons qu'elle envisage tous les cas possibles puisque, mis à part les mots grammaticaux et les interjections, il n'y a dans la langue que des mots lexicaux et qu'ils se répartissent en quatre classes: nom, qualifiant (qualificatif ou adverbe), verbe et nom propre. Du reste, ces quatre catégories correspondent passablement aux quatre catégories possibles des énoncés (des contenus de texte). Il s'agit d'objets constatés, d'idées ou de sentiments prédiqués, d'actions narrées ou de personnes qui communiquent entre elles. Les constatations visent des substances, comme font les noms (dits substantifs) ; les phrases prédicatives appliquent des idées ou des sentiments, comme font les qualifiants ; les narrations déroulent des actions, comme font les verbes ; les engagements réciproques concernent des personnes désignées par leurs noms propres.

On n'actualise pas les qualifiants parce que ces derniers n'ont besoin, pour atteindre leur but, que d'une chose: prendre leur place dans le texte, à proximité de leur noyau. Appliqués à un nom (blessure affreuse), à un verbe (se blesser affreusement), à une phrase ou à une personne (Affreux!) ils peuvent jouer leur rôle sans avoir besoin de marques supplémentaires. Ils n'ont pas à se situer dans l'environnement car ils avoisinent du texte déjà actualisé. Les qualités ne sont que des idées, ou des sentiments. Ce sont des impressions présentes, fugitives, personnelles, qui viennent s'attacher à ce qui était déjà là, dans le monde comme dans le texte, pour les colorer, les rendre réels. Les qualités sont des impressions subjectives attachées à des suites sonores. Ces impressions s'appliquent telles quelles, sans mot grammatical ni lien spécial, nuement, aux choses, idées, actions, personnes de la phrase où le qualifiant aura pris place.

Mais les noms propres, pourquoi se passent-ils d'actualisation, en français? (Ce n'est pas le cas en grec moderne, par exemple.)
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Les noms propres se passent d'actualisateurs pour une raison toute différente. Ils en reçoivent un facilement, du reste. Il suffit qu'ils cessent de ne pouvoir désigner par eux-mêmes qu'une seule et unique chose. Ex. Voici Abeille (à comparer avec Voici une abeille). La dénomination propre consiste à réserver à un élément référencé un nom qu'il possédera seul (qui lui sera propre). Dans un tel cas, à quoi servirait-il encore d'actualiser? Plus de fossé entre le monde des concepts qui est celui des noms communs et la réalité référentielle! Le mot est placé d'emblée dans cette réalité!

Les noms «propres», distingués des autres mots par une majuscule, et déjà par leur sens même (heureusement, car ils n'ont pas de marque sonore), ont un rapport au monde réel qui ne passe pas par un sémantisme conceptuel. Ils sont comme des étiquettes posées sur les objets mêmes du monde (noms de lieux, de personne, d'événements historiques). Leur actualisation et leur signification ne font qu'un. Ils n'ont de sens que du fait qu'ils s'appliquent à quelque chose d'actuel et d'unique. S'il y avait, dans le contexte, plus d'un Napoléon possibles, l'article réapparaîtrait: le Napoléon de la famille, le Napoléon historique. On observe aussi l'apparition d'une détermination par complément ou par qualificatif. Or le annonce cette détermination (la bicyclette du film de la guerre de 40). C'est qu'elle est dans le co-texte immédiat, et le rôle de l'article défini est justement de renvoyer au co-texte.
Le (la, les), simple morphème, suivi d'un substantif, l'actualise en le plaçant dans le co-texte, sans plus. C'est donc l'actualisation la plus courante.

Il n'existait pas autrefois, mais il est tout de même d'origine latine, où ille, illa, illos, illas, qui sont devenus le, la, les étaient des démonstratifs (ce, celle, ces).

Les articles, les adjectifs possessif et démonstratif.

Pourquoi l'actualisation la plus courante (donc non marquée?) est-elle le, la les, article défini? Est-elle minimale? Quelle est la façon d'actualiser qui en dit le moins? Ne serait-ce pas plutôt un?
C'était à la veille ______ célébration ______ mariage de mon frère.
1) de la, du 2) de la, d'un 3) d'une, de 4) (Selon le sens)
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Rép. de la célébration du mariage
Mais C'est la veille de la célébration d'un mariage important que le maire a eu son accident de voiture.
Et La veille d'une célébration de mariage, le maire passe chez son coiffeur.
Expl. Comme il s'agit ici d'une célébration définie et d'un mariage défini, les substantifs sont déterminés par des articles définis.

Le, la, les n'est pas la forme non marquée si elle a un contenu précis, ce qui est le cas. Ce sera plutôt l'article un qu'on prendra comme forme minimale d'actualisation. Cet article, appelé indéfini, provient du numéral un dont le sens est précis également mais qui s'est grammaticalisé, prenant ainsi un sens plus large, réduit à une fonction grammaticale. Un présente le nom comme élément quelconque, pas nécessairement le premier, ni même un seul (s'il fallait vraiment qu'il n'y en eût qu'un seul, il faudrait spécifier un seul), dans une série, ou du moins un ensemble.

On utilise un quand on n'a pas de raison d'employer un autre actualisateur, plus spécifique, notamment quand il s'agit d'introduire quelque chose dont on n'a pas encore parlé (Ex. Il était une fois un bûcheron et une bûcheronne).
Tout à coup, j'ai entendu comme ____ croassements ____ corbeau.
1) des, d'un 2) les, d'un 3) des, de 4) les, de
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Rép. des croassements de corbeau. Croassements reste à spécifier. Corbeau n'est pas actualisé (c'est une sorte de qualifiant).
Mais J'ai entendu les croassements d'un corbeau sur notre toit. (Il s'agit d'un corbeau quelconque mais ce sont ses croassements à lui.)
Et Le croassement du corbeau est rauque (deux articles définis alors que c'est le corbeau en général, mais le corbeau en général n'est plus à spécifier, on est dans l'univers intemporel).

Quel est le pluriel de un, une?
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C'était au Moyen Âge uns, unes (qui subsiste dans quelques-un(e)s). C'est devenu des. Mais tout le monde sait que des est le pluriel de l'article contracté du (ou de de la). En effet, de + les = des.

On a donc remplacé, vers le XIVe siècle, l'indéfini pluriel par le partitif. Simplification ou complication? Le risque est d'effacer les valeurs du partitif au pluriel (V. plus loin)
On lui reconnaît ____ qualités d'un vaillant combattant.
1) les 2) des 3) (N'importe) 4) (Selon le sens)
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Rép. les
Mais On lui reconnaît des qualités.
Rem. Des qualités: il s'agit de qualités non spécifiées expressément. Les qualités: il s'agit de qualités expressément spécifiées: celles d'un vaillant combattant.

On voit que c'est la valeur de l'indéfini, non celle du partitif, que des aurait pu prendre dans ce contexte. Il est vraiment devenu le pluriel de un.

Quand préfère-t-on l'article défini à l'indéfini?
L'intendant n'est pas là aujourd'hui, ni le lundi; revenez ___ mardi.
1) le 2) un 3) (Rien) 4) (Selon le sens)
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Réponse Selon le sens. Revenez mardi signifie "revenez mardi prochain". Revenez le ou un mardi signifie "revenez le mardi (en général)" ou "un mardi (quelconque)".
Règle. Le nom de jour, sans article, situe l'action par rapport au moment où l'on parle.
Mais L'article est utile quand le nom de jour indique une habitude (tous les lundis, chaque lundi), ou quand il est qualifié (le lundi d'après), etc.
Ex. L'intendant ne reçoit jamais le lundi (concept). Il compte tenir la réunion un lundi (on ne sait pas lequel).

Et le possessif, quand en a-t-on besoin?
Le père croyait dominer par ___ sévérité son fils indifférent.
1) la 2) sa 3) (N'importe) 4) (Selon la nuance de sens)
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Réponse Selon la nuance de sens. Avec la, il s'agit de sévérité en général; avec sa, d'une sévérité qui est celle du père.
Mais De la sévérité, il en faut parfois. Et Il se vante de sa sévérité devant son collègue.
Règle. L'article défini signale un référent mentionné dans le texte, visible dans l'environnement ou pris comme idée (extension dite universelle).
La tenue des Jeux olympiques à Montréal a stimulé ____ économie ____.
1) son, (Rien) 2) l', de la ville 3) l', de celle-ci 4) (Au choix, de préférence 2)
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Réponse Au choix, mais de préférence l'économie de la ville.
Mais Montréal a connu en 1976 des Jeux olympiques qui ont stimulé son économie.
Et L'organisation de jeux olympiques par la ville de Montréal a stimulé l'économie de celle-ci.
Règle. Le démonstratif renvoie à un terme qu'il désigne comme par un geste sans tenir compte de son rôle actanciel. Par exemple, celui-ci, celle-ci... renvoient habituellement au dernier nom mentionné.

Le possessif note le rapport du groupe syntaxique avec les locuteurs (mon, ton, notre, votre) ou un tiers (son, leur). En effet, l'adjectif possessif cumule le morphème défini et l'indication de la personne. Son lien avec les personnes lui donne dans le groupe du nom un rôle analogue à celui des pronoms dans le groupe du verbe (J'aime / mon amour ; tu aimes / ton amour ; il aime / son amour ; etc.) Le possessif peut donc avoir une valeur actancielle, plus ou moins explicite selon les cas. Il renvoie de préférence à un premier actant (sujet), puis à un 2e (objet); plus rarement à des circonstants.
La bouteille de whisky lui deviendra aussi nécessaire qu'au médecin ____ stéthoscope.
1) le 2) son 3) (Au choix, mais de préférence 1) 4) (Au choix, de préférence 2)
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Réponse Au choix, mais de préférence le.
Remarque. Le médecin (en général) se sert d'un stéthoscope (quelconque). Il n'est pas nécessaire d'actualiser le lexème en rapport avec la personne.
Mais Il fouillait sa trousse en vain: il avait oublié son stéthoscope (le stéthoscope qu'il aurait dû avoir avec lui).

Mais peut-on mentionner qu'il y a un «possesseur» sans devoir spécifier sa personne?
On résiste plus difficilement à ceux qui se déclarent ___ amis qu'à ____ ennemis déclarés.
1) ses, ses 2) nos, nos 3) vos, vos 4) vos, ses
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Réponse vos amis qu'à ses ennemis
Mais à ses amis qu'à ses ennemis Et à ceux qui sont devenus nos amis qu'à ceux qui restent nos ennemis
Ou à ceux qui se déclarent vos amis qu'à ceux qui se disent vos ennemis
Règle. On n'est que sujet. Il ne peut servir comme objet ou comme complément. Force est de recourir à un personnel marqué. Le contexte devra ôter cette marque.
Ex. On se voit autrement que les autres ne nous voient. Vous avez raison: il faut parfois qu'on admette que personne ne vous comprenne. (Ce nous et ce vous perdent leur marque de 1re et de 2e personnes.)

Et que signifie le démonstratif?
Le thème de la durée des sentiments a obsédé ______ velléitaire tourmenté qu'était Benjamin Constant.
1) le 2) ce 3) (Au choix, mais de préférence 1) 4) (Au choix, mais de préférence 2)
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Réponse le
Mais ...a obsédé Benjamin Constant, ce velléitaire tourmenté. Ou ...a obsédé ce velléitaire tourmenté de Constant.
Règle. Inutile de mettre un démonstratif quand le substantif est déjà déterminé (par exemple par une relative), à moins que l'on ne veuille que le référent soit comme montré du doigt. C'est alors une surcharge à valeur stylistique.
Ou Le démonstratif fait pléonasme quand le substantif est déjà déterminé.

À vrai dire... les statistiques témoignent d'un flottement pour cette QCM. La plupart des groupes québécois valident la réponse 1 mais la 3 l'est parfois, ce qui se comprend (un pléonasme n'est pas nécessairement vicieux) et aussi la 2, même à Paris.

Le de partitif.

Considéré comme un article, alors que sa forme est celle de la préposition, de, la plus typique, le partitif restera toujours un sujet délicat pour le grammairien. Ses rapports avec l'article défini sont instables. Il peut se l'adjoindre (de la), former avec lui un article contracté (du, des) ou faire cavalier seul (de dans pas de mouton, plus de moutarde). Il n'est pas vraiment distinct de la préposition puisque, placé immédiatement après un de préposition, il se réduit et s'amalgame (pas besoin de du pain ==> pas besoin de pain ).

Est-il encore préposition? Quand devient-il vraiment article?
Ensuite, on fait cuire la viande dans ____ huile de palme.
1) l' 2) de l' 3) (N'importe) 4) (Selon le contexte)
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Réponse Selon le contexte: dans de l'huile si l'on parle d'huile pour la première fois, ou dans l'huile si l'huile a déjà été mentionnée (dans le cas, p. ex., d'une recette de cuisine où les ingrédients ont été énumérés au début) ou si l'huile est dans l'environnement immédiat du locuteur au moment où il parle.
Mais N'oublie pas d'acheter de l'huile en passant par le marché; on en manquera bientôt.
Et Achète l'huile qu'il t'a déjà recommandée, pas n'importe laquelle.
Mais Dans le 2e contre-exemple, il n'y a pas de partitif, parce que ce n'est pas une partie de l'huile, mais une certaine variété (dans sa totalité), qu'il lui a recommandée.

Le partitif de et les articles partitifs du, des... indiquent qu'on n'envisage qu'une partie de quelque chose de divisible. Ex. Pas de littérature, avoir de la force, de l'énergie, reprendre des confitures (qui sont là), boire du vin (en général).
Remarque. Le partitif de s'emploie sans article avec les adverbes de quantité (assez, peu, beaucoup...) et après la négation.

Ne faut-il pas s'étonner de voir une préposition (de) utilisée comme article?
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Oui, il faut s'étonner de cette translation (changement de catégorie grammaticale). À ce propos, rappelons que pour vérifier la nature de de, il suffit de le remplacer par un peu de ou beaucoup de. La préposition servait à lier une quantité à une matière. Elle indiquait que, de celle-ci, on ne prenait qu'une partie (d'où le nom, adéquat, de partitif). Quand on a voulu actualiser une partie, mais sans pour autant mentionner la quantité, on a gardé le de, avec ou sans l'article qui suivait, selon les contextes. Je veux les dossiers (multiplicité) / Je veux de la franchise (un peu, au moins) / Il manque de franchise (beaucoup, peut-être).

Fallait-il nécessairement considérer ce de comme un article? Il s'était détaché du pivot antérieur (en sorte que sa fonction de lien disparaissait) et il produisait un certain effet sur l'actualisation du noyau de son syntagme (on n'en considérait plus qu'une certaine quantité). Il y avait donc bien translation de lien vers actualisateur. L'analyse qui menait à en faire un article ne manquait pas de justesse. Et surtout, la langue ne disposait pas d'autre moyen pour actualiser légèrement, sans insister, les parties d'ensembles. Il y avait un vide à combler.

Ce vide grammatical, comment est-il apparu? Du fait de la structure linguistique implicite. Ceux qui ne conçoivent de l'univers qu'une accumulation d'entités distinctes ne se servent que des marques du pluriel. Dans une vision ensembliste, que les mathématiques n'ont explorée à fond que depuis un demi-siècle, on a besoin de symboles d'appartenance et d'articles partitifs.

Unités, ensembles, et ...?

Faut-il se contenter d'actualiser des unités et des parties (d'ensemble)? Ne devrait-on aussi considérer le noyau nominal dans son appartenance à un système? Mais quel système?
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On fait bien d'imaginer d'autres actualisations que celle d'entités séparées ou celle des parties d'ensemble car il y a aussi des systèmes (en mathématique, on parle de matrices). En linguistique, notamment, les paradigmes, suivant le modèle saussurien, forment système. Un signe linguistique est... ce que les autres ne sont pas! Cela signifie que le choix d'un terme vaut par la possibilité dans le système du choix de tel ou tel autre terme qui aurait, lui, des valeurs distinctes. Le latin, par exemple, qui n'avait pas d'articles, ne pouvait jouer sur le choix entre un, le, et l'absence d'article, comme on le fait en français. La valeur qualifiante de l'attribut ou du complément du nom (il est facteur; un uniforme de facteur) n'aurait pas été explicite en latin. Elle aurait dû venir du contexte. Comment exprimer cela? Au moyen du trait oblique. Celui-ci sépare les choix en lice. Il est [le / un / (Rien)] facteur, par exemple, donne une idée des choix dans une sorte de matrice paradigmatique.

Une grammaire structurale reconstitue des systèmes de paradigmes. Ceux-ci listent les variantes selon les critères requis (une différence de valeur perceptible). Ils sont caractérisés par leur appartenance à un domaine (par exemple la prononciation, ou l'actualisation, ou le sens). Le chapitre de conclusion du cours offre une description complète des systèmes impliqués par le français.

Pour les champs sémantiques, ils ne sont pas toujours évidents. Comme il est parfois bon de les indiquer; on peut imaginer une évocation des variantes lexicales ou sémantiques en contexte. Il y a un truc graphique qui consiste à les placer en marge, ou à les lister en petits caractères dans les interlignes, ou à les donner si on clique sur le mot.

Pour terminer mentionnons qu'il n'y a pas que les systèmes. Il y a aussi la présence du contexte. Quand le système ou la structure n'offrent pas de différenciation pour le sens visé, celui-ci passe malgré tout, bien souvent. Comment est-ce possible?
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Parfois la résolution de problèmes d'expression prend en compte les gestes, l'attitude, les circonstances, le ton, le rythme, l'intensité et surtout les intonations, qui sont d'ailleurs indiquées parfois par les didascalies ou dans les notes de mise en scène, théâtrale ou cinématographique. Au moment du spectacle, la perception des réactions de l'acteur en situation est globale.

Notons ici que c'est cette présence du concret qui permet, par exemple, de résoudre la question de la double extension des articles défini et indéfini, extension qui est dite anaphorique ou universelle, pour reprendre la terminologie de G. Guillaume. Il faut du contexte pour que l'actualisateur défini atteigne le concret. «L'homme, un espèce de Maure» dit Hugo (dans Après la bataille). Hors de tout contexte, l'homme désignerait l'espèce humaine. Faut-il créer deux articles définis, l'un qui montre l'objet, l'autre qui vise l'essence abstraite? Faut-il envisager une «extension universelle» de l'article défini alors que simplement l'absence de contexte suffit à empêcher une actualisation avec valeur concrète (décorée sans cela du titre d'«extension anaphorique»)? Pourquoi multiplier les catégories grammaticales quand les valeurs s'expliquent par des données ...naturelles!

On trouve le même clivage (anaphorique / universel) pour l'article indéfini : un homme est venu / un homme vit en société. On le retrouve encore dans le système des temps du verbe. Le présent en contexte est actuel; hors contexte, il est intemporel (Il ouvre des yeux ronds / la porte ouvre vers l'extérieur). Il nous paraît plus simple de donner à chaque catégorie une valeur unique, qui s'infléchit en fonction des éventuels contextes. Ce qui est abstrait ou concret est le contexte. Même Guillaume s'est heurté à des exemples du genre : un chien aboie (il y a un chien qui aboie) / un chien aboie (un chien, en général, ça aboie) et le chien aboie (il y a ce chien qui aboie) / le chien aboie (le chien, en général, ça aboie). On voit mal comment lever l'équivoque sans tenir compte du contexte, mais il suffit d'en tenir compte pour qu'elle soit levée.

De toute façon, le contexte est là, fût-ce virtuellement. Il a un rôle à jouer jusque dans l'application du système, avec tous ses paradigmes. Il y a même des cas où ce rôle prend une importance excessive.
Pour avoir son train, elle devrait aller au plus press____.
1) é 2) ant 3) (Selon la nuance de sens) 4) (Selon le niveau de langue)
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Réponse au plus pressé
Mais Elle a fini par répondre oui au plus pressant de ses prétendants.
Et Elle n'a pu résister à son plus pressant désir: aller rejoindre son prétendant.
Remarque. Avec pressant, le substantif fait l'action (un ordre pressant: «qui oblige à agir sans délai»); avec pressé, le substantif subit l'action (une lettre pressée: «qui est pressée, urgente»).
Et Aller au plus pressé, locution (cf. faire, aller à ce qui est le plus pressé, urgent).

Il peut y avoir interférence avec l'expression québécoise au plus sacrant, familière, dont le sens n'est pas très éloigné («le plus vite possible»). Il reste que la locution préférée, au plus pressé, s'explique difficilement. Les actants implicites semblent favoriser davantage au plus pressant (à la chose qui presse). Mais un second sens possible, qui concernerait la personne trop aimante, parasite ce tour. On objectera que c'est la même chose pour aller au plus pressé. Il pourrait aussi s'agir d'une personne pressée. Mais cela ne donne pas autant de probabilité de sens. Le tour usité est finalement le moins équivoque. C'est la personne qui presse son agenda. Concluons, sans nier l'apport du structuralisme à la linguistique, que la structure reste prise dans un contexte, où elle ne joue qu'en tenant compte de toutes sortes de probabilités pas toujours prévisibles.

Après tout, ce rôle du contexte n'est-il pas primitif, antérieur même aux formes les plus élémentaires du langage? N'est-ce pas avec lui, et ses accumulations historiques, que les termes, les ensembles et finalement les systèmes se sont établis? Ou bien le langage est-il au-dessus de ces contingences?
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Le rôle du contexte a été déterminant dès les origines du langage. Les paradigmes ont dû se faire jour par la suite. Partons du cri animal, acte de parole élémentaire. L'intonation faisait tout et le sens était dans le contexte. On pourrait dire que l'on avait seulement du qualifiant intonatif. Le langage n'était pas encore né. Mais il n'avait plus qu'un pas à faire.

D'abord, le sens est passé du contexte à la syllabe. Le paradigme sonore a surgi comme tel en même temps que le paradigme conceptuel, quand une distinction entre deux contextes s'attacha à deux cris distincts. Le langage des corneilles est encore tel. Pas de phrase mais déjà un acte de parole réduit à un mot très bref. Le mot a existé quand le contexte, avec une ébauche de conceptualisation, s'est associé à un son (proie!) en opposition à un autre (fuite!) On était encore loin de la combinaison de deux mots et de la différenciation des groupes, nominal, verbal et qualifiant. Mais déjà, la notion de système, susceptible de relayer le contexte, était entrée en jeu.

Avant que n'apparaissent dans le langage les actualisateurs, il faudra attendre que le geste se place dans une syllabe, par exemple dire moi autrement qu'en faisant résonner sa cage thoracique à grands coups de poing ou en pointant du doigt son nez ou son coeur... Et pour exprimer des connotations, il reste encore beaucoup plus précis même aujourd'hui de donner une mélodie de phrase ou un simple ton, comme les primates. Toutes les nuances sont comprises dans le ton, et communiquées, parfaitement mais indistinctement, sans vérification possible.

Quand certaines connotations liées à des mélodies sont devenues des mots, des qualifiants, ceux-ci ont pu se combiner avec d'autres lexèmes, nominaux ou verbaux. Qui sait si ces noms et ces verbes n'étaient pas eux-mêmes d'anciens qualifiants reconvertis, dégagés de leurs connotations, rendus disponibles pour évoquer les situations où ils s'étaient produits, substances et actes.

Par sa syntaxe élémentaire, la proximité pure, le qualifiant a pu se placer dans les assemblages embryonnaires, au tout début du langage. Il n'avait nul lien mais ce n'était pas nécessaire puisque aujourd'hui encore le qualifiant va se coller à n'importe quel lexème. La mise en mots des qualifiants a fait faire à la langue un progrès décisif. On pouvait combiner des unités sonores dotées de significations. Le lexème se confirmait dans sa valeur de pivot ou de subordonné.

Quelle serait la catégorie grammaticale qui est apparue la dernière?
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Les liens syntaxiques, qualifiants délexicalisés. Il faudra attendre que la phrase gagne en ampleur et combine non plus des mots seulement mais des groupes.

Deux étapes significatives avant cela : 1o, distinction entre objets visés dans le contexte et fixation du sens dans des mots qui sont des phrases remplies de nuances mélodiques. 2o, ébauche de diverses fonctions : viser des objets, agir, exprimer des sentiments (substantif puis verbe, enfin qualifiant). Le système s'est bâti selon les besoins en contexte. L'usure des lexèmes et la grammaticalisation ont fourni des actualisateurs de plus en plus variés, des morphèmes qualifiants, enfin des liens, souvent dérivés de ces qualifiants (Ex.: passer après, après le chef).

Les assemblages ont fait naître la notion de groupe. La brièveté des mots grammaticaux, que leur place ait été avant ou après le lexème, a permis à la fonction de noyau de groupe syntaxique de se forger en s'appuyant sur le lexème, auquel le reste est venu s'accrocher.

Mais voyons de plus près comment peuvent naître les mots grammaticaux.

Lexème devenu actualisateur (délexicalisation, grammaticalisation).
Ils ont reçu ________ quant à la façon d'obtenir un permis d'exploitation.
1) différents renseignements 2) des renseignements différents
3) (N'importe) 4) (Selon le sens)
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Réponse Selon le sens: des renseignements différents si l'on veut parler de renseignements qui ne concordent pas; différents renseignements s'il y en a plusieurs, simplement.
Mais Ils reçoivent des renseignements de plus en plus différents.
Et J'aurais différentes (quelques) questions à vous poser.
Explication. L'adverbe de quantité qui modifie un numéral se place devant lui. Ex. à peine, à peu près, au moins, environ, exactement, plus de, presque, quelque.
Mais Il peut se placer après lorsqu'il forme à lui seul un groupe (Pendant cinq ans à peu près).
Et Certains adverbes de quantité (presque, tout au plus...) peuvent prendre place devant la préposition.

Différent n'est pas un adverbe de quantité. Postposé, c'est un qualificatif: «qui n'est pas le même»; antéposé, il se réduit à un adjectif indéfini pluriel: «un certain nombre de...», non sans évoquer les caractères distinctifs. Le lexème qualifiant s'est délexicalisé. Autrement dit, il s'est grammaticalisé. De qualificatif, il s'est réduit à un actualisateur.
On s'attend bien sûr à ce que _________ ne soient pas accomplies par les mêmes personnes.
1) diverses tâches 2) des tâches diverses 3) (N'importe) 4) (Selon le sens)
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Réponse des tâches diverses
Mais Diverses tâches n'ont pu être accomplies par ces personnes.
Remarque. Divers, postposé, est qualificatif: «qui présentent des caractères différents» (il peut se mettre avant le nom pour des raisons de style); antéposé, c'est un adjectif indéfini pluriel: «un certain nombre de...», non sans évoquer les caractères distinctifs.
Et Avec le choix 1, la phrase n'a plus de sens trop précis.

L'adverbe s'étant donc parfois raccourci pour devenir morphème ou lien, il a fallu, pour ses emplois lexicaux, le reconstituer, lui redonner de l'étoffe (avant ==> antérieur comme qualificatif; après ==> postérieur ; sur ==> supérieur), ce qui a demandé l'aide d'un suffixe (-ieur, du comparatif latin -ior) quand il n'a pas fallu aller jusqu'à changer de mot et prendre une nouvelle racine (sauf ==> excepté). Dans d'autres cas, pour la forme adverbiale, toujours en vue de revenir à un lexème, on étoffe en composant un syntagme puis en le lexicalisant (sur ==> dessus (= de+sur) ==> le dessus ==> au-dessus ; sous ==>... au-dessous).

La présence du trait d'union dans ces composés est pleinement justifiée par la lexicalisation car le premier rôle du trait d'union est justement de former des mots composés. Une fois la composition bien entrée dans l'usage, quand on perd de vue ses origines, le trait d'union disparaît (dedans, dehors, dessus... mais de-ci de-là comme par-ci par-là).

Usages... certes, mais aussi usure de la langue. Les sons se déforment et disparaissent, même si les lettres subsistent. Le sens s'ouvre et s'étend, il perd des sèmes, il se grammaticalise. Le mouvement inverse s'est-il produit? Les langues évoluent-elles toujours vers plus de généralité et moins de matière?
36 

Oui. La lexicalisation de se fait pas à partir de morphèmes mais de syntagmes agglutinés. Il s'agit aussi d'une perte. Ou bien il faut recourir à d'anciennes racines, et créer de nouveaux mots. Le renouveau est constant comme l'usure est inéluctable.

Indéfinis anglicisants : aucun et tel.
______ je ne vous permettrai de voir ma fille.
1) En aucun temps 2) Jamais 3) Å aucun moment 4) (Selon la nuance de sens)
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Réponse Jamais
Mais Å aucun moment de la matinée on n'a pu l'approcher.
Ou Comme j'avais un devoir à faire, je n'ai eu aucun temps libre ce matin.
Remarque. Aucun a un sens négatif en fr. (mais pas en fr. du Moyen Âge). Devant temps on a la préposition à (être à temps). Dès qu'il s'agit d'un point précis dans le temps, on emploie moment.
Et Autres locutions: en même temps, «simultanément»; en ce temps-là, «à cette époque-là». Temps libre, ellipse pour «période sans activité prévue», dans un horaire.

L'angl. at any time ne peut se traduire en fr. par aucun ou par temps. Aucun a pris en fr. un sens négatif (sauf archaïsmes comme dans d'aucuns). Temps: «période historique prolongée» et «axe de la durée» par opposition à moment: «court segment sur l'axe du temps». En fr., le temps est abstrait. Période, jour, moment le concrétisent.
Giono chante le monde malgré ses vicissitudes ______ la maladie, la solitude, la mort.
1) telles 2) telles que 3) , par exemple 4) comme
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Réponse , par exemple Ou : (deux points)
Mais Des vicissitudes telles que (comme) la maladie etc. ne doivent pas empêcher d'aimer.
Et Le nucléaire fait peur, tel un diplodocus.
Règle Le complément attributif et la comparaison sont introduits par comme.
Mais Vicissitudes étant déjà déterminé par ses, une juxtaposition suffit, avec ponctuation. Si vicissitudes n'est pas déterminé, l'énumération apporte cette détermination et doit y être reliée syntaxiquement (par tel que ou comme).

Tel est le substitut des qualifiants, il a les fonctions d'un qualifiant. Suivi de que, il s'accroche à une substance qui le précède. S'il n'y a pas de qualité évoquée dans le contexte, mieux vaut remplacer tel par comme.
Ses yeux brillent, te___ des étoiles.
1) ls 2) lles 3) (N'importe) 4) (Selon le sens)
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Réponse telles
Mais Les étoiles telles que la nova sont des énigmes pour l'astronome.
Règle. Tel + groupe nominal sans que introduit une comparaison à part, qui constitue une assertion. Tel est alors attribut du substantif qui suit et s'accorde donc avec lui et non avec la substance qui précède. Ex.: Il se contentait de regarder en souriant, tel un ange (= un ange est tel).
Rem. Le tour est littéraire.
________, vous recevrez les nouvelles pièces dans la semaine; elles seront ________.
1) Tel que demandé, tel que commandé
2) Tel que demandé, telles que commandées
3) Telles que demandées, telles que commandées
4) (Autre chose)
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Réponse Autre chose: Tel que demandé et telles que vous les avez commandées.
Ou comme vous les avez commandées, conformes à votre commande...
Mais Les nouvelles pièces, telles qu'elles ont été demandées, ne nous parviendront pas avant un mois.

Seules quelques expressions (tel que prévu, tel que convenu, tel que demandé, tel qu'indiqué...), invariables, peuvent être employées sous une forme elliptique. On peut exprimer le verbe impersonnel ou le pronom neutre sous-entendus (tel qu'il a été convenu, tel que cela a été prévu...)
Mais en dehors de ces quelques expressions, tel et le participe passé s'accordent avec le nom auquel ils se rapportent.

Accord de tout.
Quand elles prirent congé, elles furent quand même tou___ sourir___.
1) t, e 2) tes, e 3) t, es 4) s, es
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Réponse tout sourire
Mais ... toutes souriantes. Et ... tout aimables (ou toutes aimables, avec un sens différent).
Règle Tout est morphème qualifiant de l'extension. Dans le groupe verbal, il s'accorde avec le référent qu'il représente (Venez toutes). Dans le groupe nominal déjà actualisé également (Toutes les clientes). Dans le groupe qualifiant, il devrait rester invariable (Tout simplement, tout feu tout flamme).
Mais Comme épithète ou attribut, un accord est possible soit à cause de la prononciation (toute contente) soit pour la vraisemblance (une robe toute dentelle, tous volants).
Les tou___ derniers risquent de ne pas trouver de place.
1) t 2) s 3) ts 4) (Selon le sens)
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Réponse Les tout derniers
Mais Les toutes dernières risquent de ne pas trouver de place.
Et Ils risquent d'arriver tous derniers. (Ils risquent tous d'arriver derniers.)
Ou Tous les derniers se sont vu refuser l'entrée.
Et Ils ont formé des touts distincts avec chaque série de lettres.
Règle Tout, «tout entier» ou «n'importe lequel», est adjectif et s'accorde.
Ex. Ils sont tous contents. Elles sont toutes étonnées (prononcer tz).
Mais Tout, «totalement», est adverbe et reste invariable sauf s'il modifie un qualificatif féminin qui suit, et qui commence par une consonne ou un h aspiré.
Ex. Elle est tout étonnée. Elles sont tout étonnées. Elle est toute contente. Elles sont toutes contentes. Ils sont tout contents.

Complication bien entérinée par l'usage et l'enseignement et qui vient tout simplement d'une faute qu'on a été obligé d'admettre parce qu'elle s'entend, indiscutablement. La langue n'y gagne pas en clarté puisque Elles sont toutes contentes veut dire deux choses différentes.

Comme c'est une liaison qui impose cette complication, les qualificatifs en h vont provoquer des accords distincts suivant que le h est complètement amuï (tout est devant voyelle) ou partiellement (ce qui reste de l'aspiration suffit à empêcher la liaison et à provoquer l'accord audible devant consonne).
Ma tante était tou___ horrifiée par l'image tou___ hideuse que se faisait d'elle son propre neveu.
1) t, t 2) t, te 3) te, t 4) te, te
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Réponse tout horrifiée, toute hideuse Mais Elle était toute blême, tout affolée.
Rem. Horrifié: h muet (le mot commence donc, au point de vue sonore, par une voyelle); hideux : h aspiré (il équivaut à une consonne parce qu'il empêche la liaison avec le mot qui précède).
Tou___ alarmée par la fumée et les cris, elle gagna la sortie de secours, les cheveux encore tou___ humides.
1) t, t 2) t, s 3) te, t 4) te, s
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Réponse Tout alarmée, tout humides
Mais Les cris provenant tous des étages supérieurs, elle gagna la sortie et se sentit toute rassurée.
Règle Tout + qualificatif est invariable sauf si le mot qu'il modifie est féminin, suit immédiatement et commence par une consonne ou un h aspiré.
Rem. Règle bizarre car elle favorise une équivoque (Elles sont toutes propres: «elles sont tout à fait propres» / «toutes sont propres»). Il serait logique d'écrire tout (invariable) devant les qualifiants quand c'est un adverbe.
Mais Il est impossible d'écrire tout devant le qualificatif féminin commençant par une consonne (ou un h aspiré) parce que la prononciation usuelle est /toute/.

Les numéraux.

Pourquoi certains s'accordent-ils et d'autres non? Pour le plaisir de compliquer la langue française, au risque de perdre les étrangers?
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Certainement pas. Les langues sont le produit de la communication orale et écrite entre individus historiquement regroupés. Elles tendent toujours à l'économie, donc à la simplification (par l'effacement des structures incohérentes). Les subtilités inutiles ne sont que l'oeuvre de lettrés attardés, qui tentent de maintenir des incohérences. Il y a des subtilités nécessaires, sur lesquelles s'accordent les écrivains. Il y a aussi des subtilités plus curieuses, comme l'accord du participe dont l'objet direct précède, qui proviennent de simplifications qui peuvent paraître arbitraires, mais qui se sont imposées par l'usage. C'est le cas de l'accord de vingt et de cent.
Il a mis de côté deux cen__ dollars durant l'été.
1) t 2) ts 3) (N'importe) 4) (Autre chose)
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Rép. deux cents dollars Ou 200 $
Mais deux cent trente dollars
Règle Vingt et cent prennent s au pluriel quand ils terminent le numéral.
Ex. Huit cents ans / huit cent deux ans / l'an huit cent.
Expl. Le z de la liaison explique cet accord. Il assure la cohésion du groupe syntaxique. Comme l'ordinal n'est pas antéposé, il ne peut être lié. (Les années quatre-vingt.)

Pour comprendre la plupart des règles qui concernent les numéraux, tant pour l'accord que pour les traits d'union, il faut savoir que ce sont des règles générales qui leur sont appliquées. Par exemple, la marque du pluriel ne se met pas s'il n'y a pas de réelle pluralité.
J'en suis à la ______.
1) page deux cent 2) page deux cents 3) p. 200
4) (1 ou 3 au choix, mais de préférence 3)
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Rép. p. 200 Ou page deux cent
Règle Le cardinal remplace l'ordinal dans: Élisabeth II, le chapitre V, section 4.
Et Il est alors écrit de préférence en chiffres. Il ne fait pas l'accord vu qu'il n'y a pas de pluralité de la substance qualifiée.
Expl. Sachant que vingt et cent prennent s au pluriel quand ils terminent le numéral (Ex. huit cents ans / huit cent deux ans) on pourrait s'attendre à ce que p.200 écrit en lettres prenne s. Mais la page deux cent n'est en réalité qu'une seule page (200 est son rang, donc ce numéral cardinal remplace un ordinal : la deux-centième page). On écrit aussi : en l'an huit cent (mais : huit cents ans, en faisant entendre le z).

Y a-t-il d'autres types de numéraux que le "cardinal" (non marqué : 1,2,3,4) et l'ordinal (premier, deuxième, troisième, quatrième)?
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Il y a des noms de nombre (paire, quatrain, douzaine, cinquantenaire, million), qui sont toujours noyaux de syntagmes (et peuvent recevoir un actualisateur, même numéral : trois douzaines). Il y a aussi des fractions (les dixièmes, les centièmes), qui peuvent avoir un numéral comme numérateur (sept dixièmes). Il y a enfin les multiplicatifs (double, triple, quadruple, quintuple, sextuple).
Mais tripl__ buses! ne voyez-vous pas que j'ai gagné?
1) e 2) es 3) (N'importe) 4) (Selon le sens)
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Réponse triples Mais Nous sommes quatre buses.
Rem. Les numéraux ordinaux, les fractions, les multiplicatifs, les noms de nombres en -ain, -aine, -aire font l'accord en genre et en nombre.

Les règles générales qu'il est difficile d'appliquer uniformément à des numéraux sont celles de l'accord et du trait d'union. Font-ils l'accord comme les lexèmes nominaux? Quand prennent-ils le trait d'union comme des morphèmes? Sur quoi peut-on se guider?
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La longueur, et la prononciation, peuvent guider. Parfois, on indique le nombre par quelques menus morphèmes : une syllabe ou pas beaucoup plus. Ils peuvent ainsi prendre place à l'intérieur du groupe du nom ou du verbe (deux roses, deux répondirent, quatre-vingt-sept voiliers). Parfois, ils ont la forme de noms et sont alors des mots phonétiques distincts (des dizaines de milliers de voiliers). Au-dessous de cent, le numéral est de dimension assez modeste pour se placer dans le mot phonétique : il est alors invariable, non que les morphèmes ne s'accordent pas, évidemment, mais parce qu'ils ont déjà leur nombre (deux, trois, quatre). On évitera de mettre un s à quatre même si on entend toujours dire "entre quatre-z-yeux". Cette "faute"-là n'est pas entérinée par les grammaires. Pourtant, vingt et cent...

Ces deux nombres posent problème parce qu'ils sont à la limite. En-dessous de cent, il n'y a que des morphèmes (traits d'union); au-dessus, ce sont des lexèmes (quoique millier ait aussi une forme adjectivale : mille).
L'électricité éclaire maintenant deux millio__ sept cent mille foyers dans le pays.
1) n 2) ns 3) (Au choix, mais de préférence 1) 4) (Au choix, mais de préférence 2)
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Réponse deux millions
Mais deux mille sept cents foyers
Règle Mille, adjectif numéral cardinal, est invariable.
Mais Employé comme mesure de longueur, mille varie.
Explication Il y a le mille romain (1 000 pas) et le mille marin (1 852 m), sans compter le mile anglais itinéraire (1 609 m).
Rem. Parmi les numéraux cardinaux, seuls un, vingt et cent peuvent varier, sans compter millier, million, milliard, etc., qui sont des substantifs.

Non seulement on doit prendre garde à la catégorie du numéral, mais encore on vérifie son noyau.
Pour son récit de deux cents pages, il avait d'abord écrit trente et ______ mille lignes.
1) un 2) une 3) (1 ou 2, au choix) 4) unes
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Réponse trente et un mille lignes
Mais mille trente et une lignes
Rem. Un, numéral, est au singulier (les uns..., ce n'est plus un nombre) et il s'accorde en genre.
Explication C'est à mille que trente et un se rapporte. (On observera que mille n'est pas un nom, mais il y a multiplication, donc subordination plutôt que juxtaposition.)
Ça doit coûter dans les cen__ francs.
1) t 2) ts 3) (Au choix mais de préférence 1) 4) (Au choix mais de préférence 2)
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Réponse dans les cent francs
Mais dans les deux cents francs
Règle Vingt et cent prennent s au pluriel quand ils terminent le numéral. Ex. Huit cents ans / huit cent deux ans / l'an huit cent. Expl. Dans les annonce une approximation pour la somme qui suit et qui est multiple (donc les) mais cent est au singulier parce qu'il n'y a qu'une centaine.

Question piège par excellence. En surface, le pluriel saute aux yeux. Mettons des euros, on aura la liaison comme indice. Cent-z-euros? Cent-t-euros? Au Québec comme à Paris une majorité écrasante opte pour le singulier (à l'écrit), avec raison mais... les quelques hésitants étant des meilleurs par ailleurs, il faut les écouter.

Ira-t-on jusqu'à inventer une marque initiale de pluriel devant voyelle qui découle de la fréquence d'une liaison en z comme dans les nez aquilins? (On n'entendra pas dire un nez-z-aquilin!) Pourquoi ne pas admettre une telle "règle" comme émergente dans la masse des usagers? Ceux qui seraient prêts à l'admettre accepteraient sans protester dans les cents-z-euros et ne verraient sans doute pas d'objection non plus à dans les cents francs. Une telle ouverture d'esprit serait le propre des usagers les plus habiles, selon nos sondages, tant au Québec qu'en France.
Il s'adressait au public neuchatelois des années cinquant___.
1) e 2) es 3) (N'importe) 4) (Selon le sens)
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Réponse cinquante
Mais des années noires, des années dures
Déf. Les années cinquante: «celles dont le chiffre des dizaines est 5».
Expl. C'est une brachylogie (expression raccourcie) qui est entrée dans l'usage courant. Le chiffre est un ordinal puisque c'est une date. Mais il y a plusieurs années autour de cette date. L'anglais analyse moins et voit plutôt le concret, donc met le pluriel : the fifties.

Actualisation du groupe du verbe. Les Pronoms.

Je, tu, il, elle, nous, vous, ils, elles sont des mots qui désignent des personnes, non à la manière des lexèmes (nombreux sont les mots dont le sens inclut l'idée de "personnes" : les noms de peuples, de métiers, etc. ) mais parce que ce sont des personnes qui les utilisent pour distinguer entre elles-mêmes (je, nous), leurs interlocuteurs (tu, vous) et des tiers (il, elle, ils, elles). Les actualisateurs ont des fonctions pour les locuteurs en situation.

Il en découle que le mot personne prend ici un sens particulier au domaine de la grammaire. Les "personnes" dont il s'agit sont des "premières", des "deuxièmes" et des "troisièmes" personnes (du singulier ou du pluriel). Que vise donc le pronom personnel comme référent?
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Non pas telle partie du référent qui serait "capable de dire je" (ce qui est le sémantisme du mot personne) mais le type de relation qui s'établit entre les intervenants de la communication chaque fois que l'un d'eux prend la parole et se fait par là le centre à partir duquel le discours, ses modalités et même ses contenus se mettent en perspective en vue d'un effet. Les pronoms dits personnels sont donc des actualisateurs de l'énonciation.

Benveniste montre que le statut de il et elle se distingue de celui de je et tu du fait qu'ils appartiennent à l'énoncé. Sans doute. D'ailleurs il(s) et elle(s) désignent aussi fort bien des choses.

La troisième personne est donc moins personnelle que les deux autres. La première n'est-elle pas plus personnelle que la deuxième? C'est pour cela qu'on l'appelle la première... Faut-il dire que la troisième n'appartient qu'à l'énoncé? Toute énonciation peut passer dans l'énoncé (je dis... tu dis... il dit...) Il nous paraît plus exact de voir les trois personnes comme des degrés relatifs d'implication personnelle (donc de la présence de certaines personnes) dans l'énonciation. Je, tu, il, elle, nous, vous, ils, elles actualisent le verbe en situant son action par rapport aux interlocuteurs. Ils peuvent être là sans que l'on s'adresse directement à eux (3e).

Par contre, il faut indiquer leur rôle par rapport au verbe, leur actanciation. Y a-t-il d'autres pronoms personnels que ceux qui viennent d'être placés dans leur position naturelle?
56 

D'autres morphèmes se présentent aussi à nous avec un verbe, mais leur visage nous est déjà connu: le, la, les. Dans Tiens la porte! Tiens-la! Je la tiens! on voit que le morphème qui actualise le nom dans le co-texte (parfois implicite) est le même que celui qui donne son objet au verbe (il suffit de supprimer porte pour que la rejoigne le syntagme verbal, où il représente tout le syntagme nominal objet); et comme la place des morphèmes est de précéder le lexème, on verra la se placer entre je et tiens. Son rôle est le même. Lequel?
57 

Objet direct. Voici donc une série de pronoms (morphèmes du verbe) qui se caractérisent par une fonction à l'égard du verbe: ils sont l'objet de l'action (on dit parfois qu'ils la subissent).

Cette fonction vient-elle s'ajouter à la spécification de relation avec l'interlocuteur?
58 

Certes, puisqu'il existe encore me, te, nous, vous (je te tiens) dans la même position.

À propos de la fonction objet (2e actant), la série initiale : je, tu, il, elle, nous, vous, ils, elles n'a-t-elle pas aussi sa fonction?
59 

Évidemment celle de sujet. Les prétendus personnels sont donc des morphèmes du verbe qui ne marquent pas seulement la position des interlocuteurs. Ils indiquent encore leur fonction par rapport à l'action du verbe. Ils ne sont pas seulement des actualisateurs mais aussi des acteurs ou, plus précisément, dans la terminologie grammaticale, des actants.

Et lui, dans je lui tiens la porte, je la lui tiens? Voici trois personnels pour le même verbe. Y aurait-il trois fonctions à considérer?
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On pense naturellement à celle d'objet indirect, c'est-à-dire de complément qui se construirait non pas directement (sans préposition) comme le sujet et l'objet (auxquels il suffit d'avoir une place devant ou après pour qu'on connaisse leur fonction) mais avec une préposition (la plus fine possible: à ou de).

L'arrivée de cette préposition bouleverse tout le précaire équilibre qui s'était établi dans le syntagme verbal, où l'on était parvenu à introduire un objet en plus du sujet (je te tiens) mais où on ne pourra pas introduire de préposition (pour une raison fort simple: la préposition fait débuter un nouveau syntagme). Devra-t-on donc reléguer l'objet indirect après le syntagme verbal (je la tiens pour lui, avec lui, à cause de lui)?
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Remarquons la forme tonique que reçoit, dans cette position importante (noyau de syntagme), le personnel. Me, te, le, les deviennent moi, toi, lui, eux pour des raisons sonores : ils devront porter l'accent de durée qui termine le mot phonétique que doit constituer un nouveau syntagme.

Mais la langue a plus d'un tour dans son sac. Elle sait (avec la sagesse des siècles et de la masse) exploiter les moindres interstices qui subsistent entre ses règles. La préposition à, si minime soit-elle, est encore de trop pour que l'objet indirect puisse prendre place dans le syntagme verbal? Qu'à cela ne tienne! On la supprime; on ne garde que la forme tonique, lui, qui suffit à éviter la confusion possible avec l'objet direct atone (le); et on glisse cette syllabe en troisième position dans le syntagme verbal. Le tour est joué: je la lui tiens. (On garde la forme tonique mais on lui ôte son accent de durée, qui doit aller au lexème) La troisième position convient au troisième actant.

Vous me direz: mais eux, alors (le pluriel du même pronom)? Je tiens à eux... coexiste avec Je la leur tiens, la porte, où c'est pourtant aussi "à eux". D'où vient ce leur, si ce n'est pas du syntagme nominal, où il vise d'ailleurs aussi la personne (leur entrée)?
62 

Bien que leur ne varie que dans le groupe du nom (leurs entrées), il a la même origine que celui du groupe verbal, le latin illorum. Un 3e actant de la 3e personne du pluriel a deux formes suivant qu'il est dans le groupe ou qu'il forme un autre groupe. Je la leur tiens, la porte, à elles... La notion de groupe dévoile ici sa rigueur. Un rien, le petit à, si grammaticalisé qu'il soit, suffit à marquer le début d'un nouveau groupe. Eux, qui vient aussi de ille (accusatif pluriel : illos) prend la forme de leur parce que le génitif dont il provient (illorum) est moins direct que eux (illos).

Les actants peuvent donc être distingués des compléments prépositionnels du fait qu'ils peuvent toujours entrer dans le groupe du verbe. Ex. Je le lui dis (1er, 2e et 3e actant), je lui en parle (1er, 3e et 4e), tu t'y résous (1er, 2e et 3e).

On observe encore, ici, la parenté des possessifs et des personnels, respectivement morphèmes de la perspective énonciative dans le groupe du nom et dans le groupe du verbe. Naturellement, dans le groupe du nom, il n'y a plus place pour divers actants. Ils deviennent implicites (latence du nom).

Le groupe du verbe ne peut offrir de place à plus de trois morphèmes. Et pourtant, n'y a-t-il pas d'autres actants?
63 

Sans doute, du moins si l'on veut faire un tour complet des morphèmes de la position énonciative. Il y en a quelques autres d'irremplaçables: se d'abord; ensuite y et en. Que ces derniers se fassent appeler adverbes pronominaux ne doit pas nous induire en erreur. Sans doute, on a de la peine à y voir des personnels. Mais l'on se souvient que il et elle non plus ne désignent pas toujours des personnes et de toute façon cette notion de personne n'est pas essentielle car il s'agit d'actants, qui ne sont des personnes que pour certains verbes. On peut proposer comme 4e actant un complément avec de qui sera introduit dans le groupe verbal par en. (Il se souvient de ça ==> il s'en souvient).

Se prend toute sa valeur quand il désigne le même référent que le sujet. Il permet de distinguer, à la troisième personne, entre il le tient et il se tient. L'action est dite réfléchie sur le sujet. Se donne un objet qui n'est autre que le sujet, et cela tant pour le masculin singulier que pour le féminin ou pour le pluriel. On a vu plus haut que les verbes pronominaux ne donnent pas toujours à se la valeur pleinement réfléchie (On ne s'aperçoit de rien. Le rocher s'aperçoit de loin.) et que c'est alors qu'ils sont pleinement pronominaux. C'est qu'alors se a perdu sa valeur référentielle, se réduisant à une utilité grammaticale (pourquoi prendre un actualisateur comme marque d'une voix?!) Retenons ici que se comme morphème, a lui sa pleine valeur quand il désigne effectivement comme objet le référent du sujet.

On a se à la 3e personne, du pluriel comme du singulier, mais me ou nous à la première, te ou vous à la deuxième (je me tiens, vous vous tenez). La valeur est alors d'autant plus claire car il n'y a pas de grammaticalisation vers une voix pronominale.

Il reste à parler de en et y. On s'en aperçoit. C'est dire qu'on s'aperçoit de la chose. On s'y attend. C'est dire qu'on s'attend à qqch.
Dans ce feu d'artifices, il y a des fusées qui explosent en forme de sapin. Les branches
qui s'___ déploient sont féeriques.
1) en 2) y 3) (Selon le sens) 4) (Autre chose)
64 
Réponse qui s'y déploient
Mais qui s'en détachent Et qui en jaillissent
Règle En remplace tout inanimé qui soit complément avec de (parfois: la provenance); y, tout inanimé avec à (souvent: le lieu, la direction). Comp. J'en arrive, du parc et J'y arrive, au parc.
Remarque. Dans le cas d'un animé, on emploiera de préférence de + lui, elle ... et à + lui, elle ...
Remarque. Déployer: "étendre ce qui était plié", d'où "faire occuper un plus grand espace". Avec y, l'arbre est plutôt le lieu du déploiement; avec en, il en serait l'origine, idée qui correspond mieux au contenu d'autres verbes (se détacher, jaillir, provenir...)

Ces deux morphèmes (ils ne prennent place qu'à l'intérieur du syntagme verbal) ne seraient-ils pas, eux aussi, des actants? On les appelle souvent adverbes pronominaux, mais c'est une catégorie hybride dont on pourrait sans doute faire l'économie. Pourquoi y et non lui pour les compléments avec à? Parce que lui, c'est une personne? À moins que y ne soit un lieu?
65 

Il est vrai que, pour les personnes, lui doit être préféré ; et que y convient particulièrement pour les lieux (J'y vais = là, mais pas nécessairement, il peut vouloir dire seulement que l'on se met en route au sens figuré, que l'on va commencer à faire qqch. J'y veille ne veut pas dire que l'on veille à un certain endroit, mais à une chose qui demande une action).

L'évolution de en est étroitement parallèle. Ce morphème provient du latin inde, qui veut dire "de là". Lui aussi a pris un sens élargi. Je n'en ai rien obtenu équivaut à Je n'ai rien obtenu de lui. Il faut remarquer pourtant que si lui désigne une personne, le tour avec de lui sera plus châtié, alors que pour une chose, ce sera le contraire. Retenons que en sert à exprimer tout actant, de préférence non personnel, construit avec de ; comme y, tout actant qui ne vise pas une personne, construit avec à. Dans cette construction interne au syntagme verbal, en se présente donc comme comparable à y.

En somme, il existe dans le syntagme verbal un morphème objet indirect équivalent d'un complément avec à, un autre équivalent d'un complément avec de. On y a vu un adverbe parce qu'il pouvait remplacer un complément circonstanciel, mais les circonstances sont dans l'environnement : quand le verbe ne peut se construire sans elles, elles deviennent nécessaires, indispensables, et donc plus proches des actants que des circonstants (bien qu'elles en gardent la forme). Parler de circonstants est créer une catégorie grammaticale de localisation dans le temps ou dans l'espace qui ne correspond pas nécessairement à une forme précise. Mieux vaut parler de circonstance au niveau des contenus, mais d'actualisation sans plus, et d'actanciation (voir chapitre suivant) en syntaxe. Rien ne semble empêcher de ranger en et y parmi les actants. Ils ont d'ailleurs pris une extension telle, avec cette valeur, qu'ils peuvent désigner non seulement un endroit mais un objet, une idée, un sentiment, un événement, une action... tout sauf une personne (et encore, dans le langage familier, cela arrive facilement).
Tu devais me présenter tes amis, mais je ______ vois ______.
1) n'en, aucun 2) ne, aucun d'eux 3) (N'importe) 4) (Selon le sens)
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Réponse N'importe.
Mais J'aime bien mon frère mais je n'attends rien de lui.
Remarque. Il s'agit en principe d'un inanimé mais pas nécessairement. Je vois deux des filles = J'en vois deux.
Autrement dit: En remplace tout inanimé, complément avec de; dans le cas d'un animé, on emploiera de préférence de + lui, d'elle ...

Enfin, ce de est même si grammaticalisé que sa valeur prépositionnelle peut se réduire à celle du partitif (Il a de la bière ==> il en a)!

Le relatif.

Sa nature (il est hybride, à la fois morphème et lien) place son étude au chapitre des liens (ci-dessous, chap. 13). En effet, il contient presque toujours un qu-, le lien minimal des groupes verbaux, en sorte qu'il attache le verbe qui suit ; mais comme il l'attache à un nom qui précède (antécédent), il ne se contente pas d'attacher (comme fait la conjonction, placée entre deux verbes). Ex. Le duché de Nevers est vendu par les Gonzague à Mazarin, qui le donne aux Mancini. qui le donne dépend de Mazarin mais le relatif ne fait pas que rattacher le groupe verbal de donne. Il a en outre un rôle actanciel à jouer dans ce groupe, il indique aussi que c'est Mazarin (déjà objet indirect de est vendu) qui est sujet du verbe qui suit. Le relatif fait donc deux choses : il lie mais il représente en même temps un nom, et comme tel, il est actant, il joue dans la relative le rôle qu'y aurait eu son antécédent, en plus de celui qu'il a déjà dans le groupe qui précède.

On peut voir dans qui un lien (qu-) et un pronom (i pour il). Il alterne avec que et dont.
Il s'agit de substituer au capitalisme un comportement économique d'une nature différente, ____ les possibilités équivaudront au système japonais ou allemand mais ____ la source sera prise à un point encore plus naturel et même viscéral de la conscience collective.
1) que, que 2) que, dont 3) dont, dont 4) dont, que
67 
Réponse dont, dont
Mais ... que certaines de ses conséquences n'ébranleront pas.
Rem. La fonction du relatif est prise dans la relative. Avec que, il est objet direct. Avec dont, il est complément du sujet.

On se demande pourquoi le qui relatif avec antécédent et sans préposition a cette particularité d'être toujours sujet, alors que sans antécédent ou avec préposition, ou comme interrogatif, il désigne une personne mais sans qu'elle doive être sujet d'un verbe (on peut dire de qui que c'est toujours un sujet, mais un sujet au sens philosophique, quelqu'un qui dit je, ou un sujet syntaxique, comme pronom relatif. La réponse est sous nos yeux. Dans un système où les alternatives sont que et dont (l'un, objet; l'autre, complément avec de), il lui reste toute la première place, qui est celle de l'actant sujet, et rien d'autre que cette place.

En fait, il faut distinguer entre au moins cinq arrangements plus ou moins analogues. Partons de la complétive objet avec un lien pur. 1 : il sait qu'il veut (complétive directe, qu- conjonction sans plus). Ajoutons ce. 2 : il sait ce qu'il veut (démonstratif minimal plaçant près du noyau principal une substance, qui servira d'antécédent à une relative, où le que n'est plus un lien mais un objet direct). Passons à un qui intermédiaire entre le relatif et l'interrogatif. 3 : il sait qui il veut (relatif sans antécédent et donc libéré de son rôle de lien avec le co-texte, ouvrant directement sur le contexte, où il vise un animé personnel, ce qui s'appellerait un sujet dans la nature, en dehors de la grammaire). Y a-t-il un que de même construction? Oui, mais il devient quoi quand il est tonique. 3 : il sait quoi vouloir / il ne sait que dire (semi-relatif comme le précédent, désignant une chose et non une personne). Peut-on insérer ce devant qui? 4 : il sait ce qui le veut (retour à la relative avec la valeur de sujet pour qui).
Voilà _____ va des mieux!
1) qui 2) ce qui 3) qu'est-ce qui 4) qui c'est qui
68 
Rép. qui
Mais Voilà ce qui cloche. Et Qu'est-ce qui va si mal? Qui est-ce qui va mal?
Règle Le semi-relatif redevient relatif quand on place devant lui un démonstratif (ce, celui, celle, ceux) ou un clivage avec inversion. Ex. Dis-nous qui est venu / celui qui est venu, qui est-ce? / C'est qui qui est venu?).
Expl. Le qui pur (semi-relatif) serait normal avec un verbe noyau (je sais qui va venir). Ici, qui est sujet mais désigne une chose : il devrait avoir un antécédent. Insérer ce serait normal (rép. 2). L'usage en a décidé autrement, mais seulement après voilà, sans doute pour éviter le pléonasme du geste de montrer, puisque voilà et ce font le même geste).

On observe que le relatif est une grammaticalisation de l'idée de sujet et que la forme sans antécédent, celle de l'interrogatif (Qui veut-il? Que dire? Quoi faire?) est moins grammaticalisée donc sans doute antérieure. L'interrogatif se comprend lui aussi comme lien et comme actant à la fois mais ce lien, sans attache dans le co-texte, crée le besoin d'une réponse en allant chercher une attache dans le contexte.
"Sur quoi s'appuie-t-il? La balustrade sur laquelle il s'appuie pourrait
céder." Ici, quoi et laquelle sont ________.
1) pronoms relatifs 2) pronoms interrogatifs
3) pronom interrogatif et adjectif interrogatif (respectivement) 4) (Autre chose)
69 
Rép. Autre chose: pronom interrogatif (quoi) et pronom relatif (laquelle).
Mais Il n'y avait rien sur quoi s'appuyer. Et Sur laquelle des deux chaises s'est-il assis?
Ou Quelle chaise a-t-il prise?
Règle Le relatif et l'interrogatif ont les mêmes formes simples (qui, que, quoi, où) et les mêmes formes composées (lequel, laquelle, auquel, à laquelle, duquel, de laquelle).
Mais Dont ne sert que pour le relatif. L'interrogatif correspondant est de qui, de quoi.
Règle Quoi relatif ne s'emploie qu'avec préposition. Il a pour antécédent une chose seulement désignée (le démonstratif ce, un pronom indéfini, un nom commun).

Mais que faire de l'exclamatif? Est-ce une variante de l'interrogatif? Utilise-t-il les mêmes actualisateurs?
70 

La forme des complétives, le lien minimal, un simple que suffit à l'exclamation (ou un adjectif relatif).

Le relatif n'est donc pleinement lui-même qu'en co-texte. Il change de nature hors co-texte, et devient un interrogatif (Qui est là?) On l'appelerait bien interrogatif mais ce serait méconnaître ses emplois dans les prétendues interrogative indirectes (Elle se demande qui est là).

Mieux vaut ne pas faire des relatifs sans antécédent des interrogatifs car la plupart des constructions de ce type ne peuvent pas se muer en questions. C'est le verbe noyau qui leur donne cette nature interrogative et non leur actualisateur (Elle sait qui est là). En faire des relatif sans antécédent est certes explicite et clair mais puisque le qui n'est plus relatif (il ne vise plus d'antécédent) il faudrait trouver autre chose. Disons relatif libre... dans la mesure où la relation subsiste dans le contexte, et où le relatif normal s'explique comme sujet à cause de ses variantes et de leur rôle actanciel dans la subordonnée, distinct de ce rôle dans la principale, alors que, libre, ce relatif n'a de rôle que dans la subordonnée qui, toute entière, prend un rôle envers le noyau, comme les complétives. (Je vois qui tu veux dire. Je vois de quoi il s'agit.)

On pourrait aussi appeler le relatif libre actualisateur contextuel. Il diffère du démonstratif. qui est un geste, alors que le relatif libre est une façon de relier la proposition à une personne ou une chose. Rien n'empêche de le mettre dans un groupe prépositionnel. De qui, de quoi, ce sont des groupes et non des morphèmes, donc des substances, appelées sans être désignées, avec un développement possible comme complément ou actant de verbe, conjugué ou à l'infinitif, voire au participe, et pouvant aussi servir à des questions. On associe trop hâtivement les questions et les exclamations, ici, car le relatif libre, ou semi-relatif, ne crée pas d'exclamation, à moins qu'il ne soit joint à une question (Quoi?!).
La personne ______ je vous parle est, pour moi, on ne peut plus antipathique.
1) dont 2) de qui 3) de laquelle 4) (Selon la nuance de sens)
71 
Réponse Selon la nuance de sens. De qui vise la personne par son classème de personne. Dont n'est pas marqué. De laquelle suppose qu'on vise une qualité, une idée, il s'introduit plus de distance.
Règle Avec un nom d'animal ou de chose, le relatif précédé d'une préposition est à la forme composée (Le chien pour lequel...) ou, parfois, neutre (ce à quoi vous pensez).
Et Préposition + lequel a pour antécédent tout ce qu'on peut désigner d'un nom commun. Rem. Å + lesquelles: auxquelles.

Les relatifs simples sont : qui, que, quoi, dont, où.
La rupture se produit ____ le père d'Antoine vient lui reprocher d'avoir quitté le travail dans la forêt.
1) au même moment où 2) au moment que 3) au même moment que 4) (Autre chose)
72 
Réponse Autre chose: au moment où.
Ou lorsque (Évitez alors que, car il n'y a pas opposition entre la rupture et le reproche.)
Mais La rupture et l'arrivée du père d'Antoine se produisent au même moment.
Ou La rupture se produit au même moment que l'arrivée du père d'Antoine.
Règle , relatif, s'emploie pour les relatives qui sont aussi circonstancielles de situation, lieu et temps. Il alterne avec auquel, dans lequel, pendant lequel... Cf. dans l'état où, à l'endroit où, au moment où.
Rem. Dans les contre-exemples ci-dessus, le jour n'est pas circonstanciel, mais objet.
Et Ici, que n'est pas l'élément d'une locution conjonctive (sur le modèle de du moment que).
Mais Le choix 3 ne convient pas parce que le père d'Antoine vient... n'est pas le deuxième terme d'une comparaison. Le choix 1 convient encore moins parce que, de plus, même n'est pas associé à que mais à . La rupture se produit au moment même où...

Avec le même moment, le noyau est spécifié par même et la relative ne peut plus être déterminative (il faut une virgule). On peut ajouter une relative mais dans un autre acte de parole. La rupture arrive au même moment que pour son ami, celui où le père Antoine lui reproche... Ou: La rupture arrive au même moment que pour son ami, celui qu'avait choisi le père Antoine pour lui reprocher...

Que deviennent les personnes du verbe, avec des relatifs? Sont-elles supprimées du fait que le relatif ne varie pas lui-même en personne? Ou bien la relative peut-elle avoir son verbe à la première ou à la deuxième personne aussi bien qu'à la troisième?
Vous n'êtes pas les blessés qui exig___ le plus de soins.
1) ent 2) ez 3) (N'importe) 4) (Autre chose)
73 
Réponse exigent Mais Vous n'êtes pas ceux qui exigent (exigez) le plus de soins.
Règle Quand l'antécédent du relatif est un nom attribut d'un pronom de la 1re ou de la 2e personne, l'accord se fait le plus souvent avec l'attribut (3e personne) mais un accord avec le pronom (1re ou 2e personne) est possible si le sens y incline. Ex. Vous êtes le premier qui ayez été aussi remarqué.
Rem. Faire l'accord à la 1re ou à la 2e pers., c'est ajouter une marque par laquelle l'un ou l'autre des interlocuteurs se sentira plus concerné.
Ce n'est pas toi, n'est-ce pas, qui ____ donné ____ nom pour être trésorier?
1) a, son 2) as, ton 3) (Selon le sens) 4) (Autre chose)
74 
Réponse qui as donné ton nom
Mais Ce n'est pas toi, hein, celui qui a donné son nom pour être trésorier?
Règle Pour l'accord, qui et que sont considérés comme de la même personne, du même genre et du même nombre que leur pivot (ou antécédent).
Rem. Dans le contre-exemple, l'antécédent du relatif est celui (3e personne).
Et Avec: Ce n'est pas toi, n'est-ce pas, qui as donné son nom?, il s'agirait du nom d'une tierce personne.

Interrogatif et exclamatif.

C'est le moment de s'interroger sur le pronom interrogatif. Est-il un actualisateur? Ses formes, à part dont, sont les mêmes que celles du relatif...

On se demandera comment distinguer les trois qui.
" Qui allait la renseigner? Elle ne savait pas à qui s'adresser. Y avait-il un gardien à qui demander la clé?" Les trois qui sont ________.
1) pronoms interrogatifs 2) relatifs libres 3) pronoms relatifs 4) (Autre chose)
75 
Réponse Autre chose : respectivement pronom interrogatif, relatif libre et pronom relatif.
"Quel est donc cet oiseau? Lequel? Celui duquel on entend la voix." Quel est ________.
1) adjectif interrogatif 2) pronom interrogatif 3) pronom relatif 4) (Autre chose)
76 
Réponse Autre chose : respectivement interrogatif (attribut de oiseau; il y a inversion à cause de la question), pronom interrogatif et pronom relatif (antécédent : celui).
Mais Quel oiseau a chanté? (adjectif interrogatif dans un groupe nominal sujet)
Ou Lequel de ces cris est celui d'un oiseau? (pronom interrogatif sujet)
Et Elle avait un oiseau gris et bleu, lequel chantait rarement (pronom relatif).
Rem. Quel est seulement interrogatif (adjectif ou attribut).

Qui est-il au singulier ou au pluriel?
Je me demande ___ qui viennent crier ainsi la nuit sous nos fenêtres.
1) (Rien) 2) qui est-ce 3) qui sont-ce 4) (Autre chose)
77 
Rép. Autre chose: qui vient Ou qui est-ce qui vient Et quels sont les garnements qui viennent
Et qui sont ceux qui, quels sont les jeunes gens qui Mais qui sont ces garnements, quels sont ces cris
Rem. Qui sans antécédent est laissé au singulier (et, habituellement, au masculin, car on ne sait pas encore de qui il s'agit); qui est-ce qui, forme d'insistance, est au singulier aussi.
Et Ce qui est appelé interrogatif plutôt que relatif. Mais Qui sont-ils? (Qui est attribut)

Quoi, forme tonique de que, ne se rencontre pas comme relatif objet.
"Å quoi voulait-il en venir? Il a demandé quoi au juste?" Quoi, interrogatif ________.
1) a les mêmes fonctions que quoi relatif et convient comme ce dernier pour désigner qqch. qu'on peut ramener à cela, tout, rien
2) s'emploie comme complément prépositionnel, à l'instar de quoi relatif; et représente un non animé
3) a les mêmes fonctions que quoi relatif, mais une représentation plus large (tout sauf les personnes)
4) diffère de quoi relatif, car il désigne n'importe quoi (sauf une personne) et prend parfois la fonction d'objet direct (pour étoffer que)
78 
Réponse diffère de quoi relatif, car il désigne n'importe quoi (sauf une personne) et prend parfois la fonction d'objet direct (pour étoffer que)
Règle Quoi relatif ne s'emploie qu'avec préposition. Il a pour antécédent une chose seulement désignée (le démonstratif ce, un pronom indéfini, un substantif considéré comme substance «neutre», un qualifiant attribut). L'utiliser avec un nom de sens précis est désuet ou littéraire.
Ex. Voilà quelque chose à quoi nous ne pourrons jamais nous résoudre.

LES MORPHÈMES

ACTUALISATEURS ET QUALIFIANTS

(articles, adjectifs démonstratif, possessif, numéraux, indéfinis, pronoms, adverbes)
VALEUR FORME
Au syntagme nominal comme adjectif Au syntagme verbal
comme actant
Au qualifiant, comme qualifiant (adverbe)
UNITÉ
négation de l'unité
un seul (-e)
pas un (-e)(seul)...ne
aucun (-e,-s)...ne
nul (-le,-s)...ne
un seul (-e)
personne ne, rien ne
aucun (-e,-s) ne
nul (-le,-s) ne
seulement
(ne) pas seulement
(ne) pas
non
MULTIPLICITÉ
nég. de la multiplicité
quantité
nég. de la quantité
comparatif d'égalité
comparatif positif
comparatif négatif
superlatif
superlatif négatif
suffisance
suffisance négative
suffisance excessive
deux (trois, ...)
pas deux (trois,...) plusieurs, beaucoup de79 
tant de, tellement de
peu de
autant de
plus de
moins de
la plupart des, le plus de
le moins de
assez de
pas assez de
trop de
les deux (trois, ...)
plusieurs, beaucoup
tant, tellement
peu
autant
plus
moins
la plupart
assez
pas assez
trop
deux fois (trois, ...)
plutôt, très
si
peu
aussi
plus
moins
le plus, des plus
le moins, des moins
assez
pas assez
trop
EXTENSION
distribution
négation de l'extension
tout le (-e la, -s les, -es les)
chaque, tout (-e)
pas tout le (-e la, -s les, -es les)
tout (-s, -es)
chacun (-e)
l'un... l'autre...
tout (-e, -es (!))
tout à fait
spécialement
un à un
pas tout à fait
presque, quasi
GESTE
montrer dans le contexte
ce (-t, -tte, -s)
ce ...-ci (-là)
ce, ceci, cela
celui-ci, celle-, ceux-
celui-là, celle-, ceux-
ce qui, celui qui, celle qui, ceux qui
ci-dessus
là-dessus
montrer
dans le co-texte
le, la, les
au, aux, du, des
il (-s), elle (-s) sujet
le, la, les objet direct
y, en objet indirect
PERSONNE
sujet
objet direct
réfléchi
objet indirect avec à
objet indirect avec de

{mon, ton, son
ma, ta, sa
mes, tes, ses
notre, votre, leur
nos, vos, leurs}80 
je, tu, il, elle,
nous, vous, ils, elles
me, te, le, la
nous, vous, les
se
me, te, lui,
nous, vous, leur, y
en81 
personnellement
Et dans le groupe du nom, propre, qualificatif grammaticalisé.
LIEU ce ... -ci, ce ... -là y, en (de là) ici, là82 
SUBSTITUT d'actualisation un (-e, des) on
ça
substitut de qualifiant un tel ... (une telle, de tels, de telles) tel (-le, -s) ainsi
Ainsi, ...83 
substitut déclaré comme tel quelque (-s)
n'importe quel
quelqu'un (-e)
quelque chose
substitut précisé quant à soi certain (-e, -s)
un certain n. propre
certains (-es)
IDENTITÉ
altérité
morphème + même (-s) + nom
morphème + autre (-s) + nom
moi-, toi-, lui-, elle-, nous-, vous-, eux-même (-s)
un (-e) autre
vraiment
autrement
PRONOM RELATIF
(lien + actualisateur)
relatif qualifiant
relatif généralisant

lequel, laquelle, lesquels, lesquelles84  + nom
un (-e) quelconque + nom; n'importe quel (-le, -s, -les) + nom
qui (à ..., de ...), que, quoi (à ..., de ...), dont, où (d'...)
lequel, laquelle, lesquels, lesquelles
quiconque, n'importe qui (... quoi, ...où)
relatif libre (interrogatif ou semi-libre) quel (-le, -s, -les) + nom (?,!) qui (à ..., de ...), que, quoi (à ..., de ...), où (d'...) (?) Où, quand, combien, comment, pourquoi (?)

EXERCICE

Prendre une phrase quelconque. Marquer les mots grammaticaux. (Laisser de côté les mots lexicaux.) Les liens syntaxiques (à, de, que, et...) seront surmontés d'un + (pour éviter de devoir recopier le texte, tracer le signe + légèrement à la mine de plomb). Les actualisateurs seront surmontés d'un astérisque (*), symbole qui représente bien l'actualisation car, de même que le concept du mot lexical se trouve placé par l'actualisateur dans notre environnement, l'étoile est dans notre univers, relation entre lui et nous. Exemple.
 +  *         *                 +      *                               *         
Et le grillon s'était endormi dès que la dernière bluette avait éteint sa 
+    *        +   *
dernière lueur dans la cendre de la cheminée.   

Noter ses hésitations et tenter d'expliquer ce qui fait que l'on hésite. Communiquer ses doutes pour voir s'ils sont faciles ou difficiles à résoudre. Se référer au tableau ci-dessus.

L'ACTUALISATION 1

La forme actualise. 1

Les actualisateurs. 6

Les articles, le possessif, le démonstratif. 9

Le de partitif.
12

Unités, ensembles, et ...? 13

Lexème devenu actualisateur (délexicalisation, grammaticalisation). 15

Indéfinis anglicisants: aucun et tel. 16

Accord de tout. 18

Les numéraux. 19

Actualisation du groupe du verbe. Les Pronoms. 21

Le relatif. 24

Interrogatif et relatif. 26


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